Les brèves


Revue Politique étrangère : printemps 2025

Nicole Gnesotto, créée le 09-03-2025

"Dans ce numéro qui vient de paraître, deux dossiers que j’ai trouvés particulièrement éclairants : l’un sur L’Outre-mer français, une espèce de bombe à retardement que nous devrions surveiller de près, et l’autre sur l’Ukraine, signé de Pierre Vimont, grand diplomate français et européen (par ailleurs directeur de cabinet de Dominique de Villepin, et dans le film de Bertrand Tavernier Quai d’Orsay, interprété par Nils Arestrup). "


Guten Tag, madame Merkel

Michaela Wiegel, créée le 09-03-2025

"Je me suis moi aussi attardée cette semaine sur une époque un peu révolue … Je vous conseille cette pièce de théâtre. Il est assez drôle d’avoir consacré en France un spectacle à l’ex-chancelière alors que cela ne serait venu à l’esprit de personne de le faire en Allemagne. C’est écrit et interprété avec beaucoup d’humour et de finesse par Anna Fournier, seule en scène. C’est bien sûr un regard français, sur Mme Merkel mais aussi sur toute une époque, sur des présidents français, et sur des bouleversements historiques plus heureux que ceux que nous vivons aujourd’hui : la chute du Mur par exemple. Pour ceux qui veulent jeter un regard un peu ludique sur ces dernières années, allez voir ce très bon spectacle. "


Rwama, tome 2 : mon adolescence en Algérie (1992-2000)

Akram Belkaïd, créée le 09-03-2025

"J’avais déjà recommandé le premier tome de cette bande dessinée de Salim Zerrouki. Dans ce deuxième volume, l’auteur raconte son adolescence dans l’Algérie de la décennie noire, de la guerre civile. Si ce sujet difficile vous intéresse, c’est une façon d’y entrer de façon un peu légère. On y voit à quel point la jeunesse algérienne a vécu quelque chose de terrible. Elle regardait les feuilletons américains sur les chaînes françaises à la télévision, mais dehors, c’était le couvre-feu, les assassinats, les attentats … On sent dans l’ouvrage à quel point la France constitue un arrière-plan toujours présent en Algérie, quels que soient les milieux. Très touchant, et passionnant. "


Le complot contre l’Amérique

Matthias Fekl, créée le 09-03-2025

"Je suis en train de lire ce livre de Philip Roth, paru il y a une vingtaine d’années. L’auteur imagine qu’en 1940, ce n’est pas Franklin Roosevelt qui devient président des Etats-Unis, mais Charles Lindbergh, talentueux aviateur et pro-nazi … Il y a le côté un peu loufoque de Musk, mais aussi un projet réactionnaire et d’extrême-droite qui s’empare de la Maison Blanche, avec tout ce que cela répand d’antisémitisme et de peurs dans la société américaine. Ce n‘est pas une lecture particulièrement réjouissante ou porteuse d’espoir, mais cela remet bien les idées en place. "


La saga des grands magasins : de 1850 à nos jours

Philippe Meyer, créée le 09-03-2025

"Mon autre recommandation est plus légère, et elle est pour l’exposition qui se donne à la Cité de l’architecture et du patrimoine jusqu’au 6 avril prochain. D’abord, on ne va jamais assez dans ce musée extraordinaire, avec tous ces moulages des plus impressionnantes façades du patrimoine français, de la cathédrale de Rodez à celle de Chartres, en passant par le palais Jacques Cœur de Bourges … Au sous-sol, il y a cette exposition sur les grands magasins, la troisième en très peu de temps (après une première à Caen, et une deuxième au musée des Arts décoratifs). C’est aussi une espèce d’adieu à une certaine forme de commerce, qui mérite d’être revisitée. "


Revue Le Grand Continent

Nicole Gnesotto, créée le 09-03-2025

"Les évènements s’enchaînent à une allure telle que les livres de géopolitique se périment très vite. Il vaut donc mieux lire les revues, et je vous en conseille deux. Dans le Grand Continent (qui est une revue en ligne), un long entretien de Louis Gautier, ancien secrétaire général de la Défense et de la sécurité nationale, sur tous les sujets dont nous avons parlé aujourd’hui. Ukraine, OTAN, Défense européenne, dissuasion élargie … Au passage, il faut rendre hommage à cette revue, à mon avis la création la plus intelligente de ces dix dernières années parmi les publications géopolitiques. "


Notre homme à Washington : Trump dans la main des Russes

Jean-Louis Bourlanges, créée le 02-03-2025

"Pour prolonger notre conversation d’aujourd’hui, je vous recommande ce livre de Régis Genté. Il est court, très élégamment écrit, et il montre parfaitement la profondeur, l’intensité et l’ancienneté des liens entre le 47ème président des Etats-Unis et la Russie, qu’elle soit soviétique ou non. Ces liens remontent aux années 1970, ils ont été décisifs au moment d’aventures financières scabreuses et aléatoires de Donald Trump. Cela met en évidence une dissonance assez profonde entre la stratégie des Républicains de l’époque Reagan / Bush 1, et les positions de Trump. Est-il pour autant un agent ? Le livre montre bien à quel point il est parfaitement identifié et « choyé » par les services de renseignement russes. Traître ? Pas encore (c’est beaucoup plus récent), mais manifestement d’intelligence avec l’ennemi. Le livre met le doigt sur une chose qu’on a du mal à comprendre : comment les Républicains d’aujourd’hui peuvent-ils s’accommoder d’une rupture aussi totale avec les victoires de Reagan et de Bush senior ? Car s’il est une chose dont les présidents Républicains peuvent s’enorgueillir, c’est d’une victoire dans la guerre froide. Il semble que Trump tétanise le parti républicain, on se demande pour combien de temps."


Hommage à Roberta Flack

François Bujon de L’Estang, créée le 02-03-2025

"Ce n’est pas de jazz dont je vous parlerai cette semaine, mais de soul music, puisque j’aimerais évoquer la disparition de Roberta Flack, à 88 ans. Immense figure de la soul, même si elle est moins connue que Nina Simone ou Aretha Franklin, pure washingtonienne bien que née en Caroline du Nord, elle fut une icône musicale, récompensée de deux Grammy awards en 1973 et 1974, pour des chansons devenues des classiques du patrimoine américain : « The first time ever I saw your face », et le véritable tube planétaire « Killing me softly with his song ». Deux chansons qu’elle popularisa au point qu’on croit qu’elle en est l’auteure. Roberta Flack était également une figure de la lutte pour les droits civiques, proches de grandes figures afro-américaines comme Angela Davis et Jesse Jackson. Merveilleuse chanteuse, très grande dame. Je suis très heureux d’avoir eu la chance d’assister à sa rencontre avec Nelson Mandela en 1999 à Washington. Si vous voulez l’écouter, je vous recommande particulièrement ses deux premiers disques : First take et Chapter Two."


Méfaits du tourisme

Philippe Meyer, créée le 02-03-2025

"Sous l’influence du tourisme, à Paris, les marchands de souvenirs, les vendeurs de vêtements, les boutiques d’objets de décoration, les boutiques de cosmétiques et de parfumerie, une certaine restauration rapide remplacent nombre de commerces de première nécessité. Il en résulte une concentration de l'offre qui provoque un enchérissement de la vie quotidienne. Parallèlement, un nombre croissant d’appartements deviennent des logements provisoires destinés aux touristes après que les propriétaires ont fait partir leurs locataires à bail en augmentant leur loyer au maximum. Cette tendance à l’enchérissement des loyers, qui atteint fréquemment des hauteurs impudentes touche également les locaux professionnels de certains métiers essentiels, notamment les professions de santé. Médecins, infirmiers, kinésithérapeutes et autres professions dont les actes et consultations sont réglementés doivent ou bien faire face à ces augmentations ou bien quitter les quartiers touristiques où ces augmentations de loyer sont lesplus nombreuses et les plus conséquentes ou encore avancer leur départ à la retraite. Dès le milieu des années 1990 des voix s'étaient fait entendre pour appeler les pouvoirs publics, notamment municipaux, à élaborer une politique de régulation des conséquences du tourisme dont on sait que les excès ont provoqué dans certaines villes européennes des effets presque irréparables et des mouvements d'hostilité d'une partie de la population. À quelques mois des élections municipales cette politique de régulation devrait être l'un des premiers éléments des programmes des différents candidats. Il faut pour le moment à Paris se contenter d’un texte qui rend plus risquée et plus coûteuse la fraude aux locations touristiques hors règles, mais sans que l’on aperçoive les moyens de son application tandis que le président de la République appelle à une augmentation de 33% des visiteurs du Louvre, souhaitant porter leur nombre à 12 millions quand le plus grand musée du monde a été conçu pour en accueillir 4 millions. Quand on sait dans quel état est aujourd’hui le Louvre, cela s’appelle compter sur la phtisie pour soigner la tuberculose."


J’écris l’Iliade

Marc-Olivier Padis, créée le 02-03-2025

"Je vous recommande ce livre de Pierre Michon, cas particulier parmi les écrivains français, peut-être le seul à s’inscrire dans une grande tradition littéraire, et pour qui la seule justification de l‘écriture est de tenter de se mettre à l’altitude de la plus haute littérature. Il n’écrit pas pour régler des comptes avec son héritage familial ou pour parler de lui, ni pour transposer dans un futur proche ou un passé plus ou moins lointain des problématiques de l’actualité. La seule ambition qui vaille à ses yeux est de se mesurer aux plus grands, en l’occurrence Homère. Ambition démesurée, évidemment vouée à l’échec, mais un échec lucide et splendide, qui le conduit à réécrire le mythe d’Actéon, ce chasseur qui vit Artémis au bain et fut changé en cerf, puis dévoré par ses propres chiens, ou de Pasiphaé. Une lecture toujours éblouissante. "


Quatre nuits d’un rêveur

Lucile Schmid, créée le 02-03-2025

"Je suis pour ma part allée au cinéma, où j’ai vu ce film de Robert Bresson de 1972, qui vient de ressortir. Il est extraordinaire, avait inspiré les Amants du Pont Neuf de Leos Carax. Pendant quatre nuits, Jacques et Marthe sont enveloppés par le Pont Neuf, par les bruits, par les lumières, par cette vision d’un Bateau mouche d’où sort une bossa nova envoûtante. Le film est profondément mélancolique, puisque Jacques n’arrive pas à parler aux femmes, ce qui le conduit à enregistrer des déclarations d’amour assez stéréotypées sur magnétophone, tandis que Marthe rêve à des hommes qui n’existent pas. Quand il réalise ce film, Robert Bresson a 70 ans, mais il réussit à faire passer cette mélancolie d’une jeunesse qui a tout espéré de mai 68, et se réveille face à une réalité où l’amour n’a guère de place, sinon dans les rêves et la mélancolie …"