Les brèves

Journal janvier-juin 2020

Richard Werly, créée le 08-10-2023

"De l’autre, le journal d’Agnès Buzyn, qui vient de paraître. Elle y règle aussi des comptes, mais très prudemment : ni avec Edouard Philippe, ni avec Emmanuel Macron. Avec tous les autres en revanche, elle ne se prive pas. Personnellement, ces règlements de comptes littéraires me posent des questions. Encore une fois, le lecteur peut y trouver du plaisir, voire de l’intérêt, mais on a tout de même envie de demander à ces deux auteurs : « et après ? »"


Histoire totale de la seconde guerre mondiale

Nicolas Baverez, créée le 01-10-2023

"Passons de la géographie à l’Histoire, puisque je vous recommande cet ouvrage d’Olivier Wieviorka. J’ai l’impression qu’avec ce travail, l’auteur a remporté son pari, pourtant très ambitieux. On a à la fois tous les fronts, mais aussi toutes les dimensions : militaire, stratégique, économique, sociale, politique, idéologique … C’est d’une certaine manière l’aboutissement de toute une vie de travail, ce livre est non seulement un grand livre d’Histoire, mais aussi un éclairage très précieux pour aujourd’hui. Quand on regarde la guerre d’Ukraine par exemple, il y a des souvenirs de la grande famine organisée par Staline. Du côté de Poutine, il y a la référence permanente à la guerre patriotique, et l’affirmation aberrante selon laquelle l’Ukraine serait dirigée par des nazis. "


L’énigme algérienne : chroniques d’une ambassade à Alger

François Bujon de L’Estang, créée le 01-10-2023

"Faisant partie de cette corporation, j’ai été particulièrement frappé par la pluie de livres de souvenirs d’anciens ambassadeurs, c’est une véritable épidémie. Il faut donc être méfiant, mais tout de même, certains de ces livres sont intéressants, quand ils sortent de la catégorie des mémoires. C’est le cas de celui de Xavier Driencourt, publié en 2022. C’est le bilan d’une expérience forte (Driencourt a été deux fois ambassadeur en Algérie), et le livre et très éclairant sur le pays, et non sur les mémoires de son auteur. Le diagnostic que pose l’auteur sur l’Algérie est implacable, il démontre que le ressentiment anti-français est un fonds de commerce permanent, utilisé par les dirigeants algériens pour vivre d’une « rente mémorielle » ; c’est mis en lumière dans tous les chapitres qu’il examine, à propos de l’immigration, par exemple. Le fait qu’un pays qui critique ouvertement et constamment la France, et s’efforce d’éradiquer l’enseignement du français dans l’enseignement privé, vit toujours sur l’accord de 1968 sur l’immigration, donne à réfléchir."


Croix de cendre

Philippe Meyer, créée le 01-10-2023

"Je recommande ce roman d’Antoine Senanque, qui figure sur la liste des Goncourt. L’intrigue se déroule dans un milieu qui excite les curiosités, le milieu ecclésiastique, sur fond de rivalité entre religieux dominicains et prêtres séculiers au 14ème siècle, le siècle de Maître Eckart, l’un des héros de ce livre, juste après la peste noire. Antoine Senanque réussit à maitriser une documentation substantielle, il peint des personnages auxquels il n’est guère possible de ne pas s’attacher et d’autres - un autre notamment, l’inquisiteur de Toulouse - dont il n’est pas possible de ne pas être effrayé. Quand Antoine Senanque prend des libertés avec l’Histoire, ce sont des libertés fécondes et étonnamment vraisemblables. On a qualifié son roman de roman épique ou de polar moyenâgeux. Ce sont des qualificatifs incontestables, mais je leur ajouterai qu’Antoine Senanque est d’abord un écrivain de l’amitié. Cela m’avait frappé dans l’un de ses précédents romans Que sont nos amis devenus ? que j’avais signalé à nos auditeurs, c’est encore plus évident dans celui-ci et ce n’est pas le moindre de ses charmes."


Le dernier cortège de Fidel Castro

Philippe Meyer, créée le 01-10-2023

"Je signale aussi que Matthias Fekl signe, aux éditions Passés Composés Le Dernier cortège de Fidel Castro, dans lequel il parcourt à l’envers le chemin qui a conduit les barbudos de Santiago à La Havane, de la révolution au parti unique. Il place en exergue de son livre cette phrase d’Ivan de la Nuez : « Depuis longtemps, à gauche comme à droite, Cuba est un endroit où l'on vient non pour découvrir la réalité mais pour confirmer un script ; les paradoxes sont remis à l'arrière-plan et les habitants condamnés à être de simples symboles des préjugés et jugements antérieurs des visiteurs. »"


Mappa naturae

Béatrice Giblin, créée le 01-10-2023

"« Je n’affirme pas qu’il est impossible de tenir une conversation intelligente sans l’aide d’un atlas, mais je dis que dès que les hommes commencent à parler de quelque chose de vraiment important, il faut aller chercher l’atlas ». Rudyard Kipling. Je vous recommande ce livre, signé par un collectif qui a pris le nom de Stevenson. C’est le troisième volume de cet travail sur les cartes, et celui-ci est consacré à la géographie physique (les deux précédents à la géographie urbaine et aux îles) : océans, montagnes, déserts, pôles ... On navigue dans tout cela et aussi à travers le temps, car certaines cartes sont très anciennes, il y a par exemple la première carte météorologique de Halley (celui-là même qui donna son nom à la comète). L’ouvrage est très beau et donne beaucoup à rêver. Et en face, il y a toujours des textes, de Kipling à Léonard de Vinci. Enfin, ce travail n’est absolument pas réalisé par des géographes, mais par des philosophes, des historiens. Personnellement, cela me désespère un peu pour les géographes, car cela prouve qu’ils n’ont toujours rien compris."



La visite du pape François

Jean-Louis Bourlanges, créée le 24-09-2023

"J’aimerais manifester mon agacement face aux réactions qu’a suscité la visite du pape. Cet agacement est double. D’abord, envers ceux qui reprochent au président de la République d’avoir assisté à la messe. Les relations entre le Saint-Siège et la République française sont des relations de respect d’Etat à Etat, et la pratique religieuse est une pratique que le président de la République a le devoir d’honorer. La limite à ne pas franchir était celle qu’avait établie le général de Gaulle : quand un président de la République assiste à une messe, il ne communie pas, car l’eucharistie est un sacrement, qui a valeur d’adhésion religieuse, et pas seulement une marque de respect du pouvoir républicain. Je suis tout aussi agacé par la phrase du pape : « je ne viens pas en France, je viens à Marseille ». Je n’ai jamais vu que quand quelqu’un vient dans votre appartement, il dit qu’il n’est pas chez vous … Ce n’est certes pas une visite d’Etat, mais il vient tout de même sur le territoire de la République française."


Anatomie d’une chute

Michel Eltchaninoff, créée le 24-09-2023

"Ce film de Justine Triet m’a bouleversé. Un petit garçon rentre d’une promenade, dans son chalet, et trouve son père, qui vient de mourir d’une chute. Accident ? Suicide ? Meurtre ? Car la mère de l’enfant est rapidement accusée. C’est un film sur le travail de la police et de la justice, mais surtout sur la recherche de la vérité, à une époque où l’on pense souvent qu’elle n’existe plus. La police et la justice n’y arrivent pas vraiment dans ce film, mais le petit garçon, lui, tient à assister à toutes les audiences, et surtout il invente des méthodes pour découvrir cette vérité, met en place de véritables protocoles expérimentaux. Sommé par les protagonistes de choisir un camp, il s’y refuse, et trouve la vérité grâce à l’interprétation. Magnifique."


Ombres et lumières d’Afrique

Lionel Zinsou, créée le 24-09-2023

"Pour les gens qui s’intéressent à l’Afrique et ont besoin de faits, je recommande cette lecture. Il y aura trois tomes, et les deux premiers ont déjà paru. Paul Derreumeaux est un Français, qui a créé une famille malienne mais aussi une grande banque panafricaine, la Bank of Africa. C’est un excellent économiste de terrain, et l’ouvrage rassemble un travail de dix ans, qui éclaire toutes les contradictions et les espérances du continent."



Tapie

Philippe Meyer, créée le 24-09-2023

"Enfin, une série, visible sur Netflix. Très bien faite et très bien jouée. A mon avis pas très honnête car elle se termine par l‘emprisonnement de Tapie, comme si la fin de ce personnage avait été de payer pour l’ensemble de son comportement. Si habile que soit la série (et elle l’est vraiment), on ne peut s’empêcher de se rappeler une phrase fâcheuse du président de la République, qui à la mort de Bernard Tapie, avait dit qu’il était une « source d’inspiration pour la jeunesse française ». Cela reviendrait à qualifier Patrick Poivre d’Arvor de source d’inspiration pour le journalisme ou la galanterie …"