Les brèves

Miarka

Philippe Meyer, créée le 05-09-2021

"C’est le portrait d’une jeune femme, à vrai dire encore une adolescente : elle a 19 ans quand elle entre dans la Résistance où elle est chargée de l’acheminement des faux papiers. Elle court de grands risques pendant deux ans, avant d’être arrêtée, torturée et envoyée à Ravensbrück puis à Mauthausen pendant que sa mère, son père, son frère Jean et ses sœurs Madeleine et Simone sont déportés dans le cadre de la solution finale. Denise Jacob – Miarka dans la Résistance- est la sœur de Simone Jacob, plus tard Simone Veil. Leur père, leur frère, leur mère mourront dans les camps. Miarka est le portrait d'une femme de beaucoup d’éclat physique et moral, issue d’une famille impressionnante par son attachement au savoir, aux livres, à la littérature, à la conversation, aux échanges, à l’impératif moral, à la recherche de la beauté et à la France. L’admiration qu’Antoine de Meaux voue à Miarka n’est pas béate, elle est tonifiante et contagieuse. Mais son livre est aussi un livre remarquable -et, quelquefois, terrible - par la clarté, la précision et la retenue qui en sont la marque. Pour moi qui ai signé avec Frédéric Rossif « De Nuremberg à Nuremberg », un documentaire sur le nazisme, la difficulté dans laquelle se sont trouvées les déportées parce que résistantes et les déportées parce que juives à partager leur destin n'a jamais été aussi claire, ni aussi prenante. La réflexion sur la transmission qui termine ce livre me touche au plus haut point."


Mohican

Richard Werly, créée le 05-09-2021

"Ce roman d’Eric Fottorino, qui vient de paraître, nous raconte l’histoire del a fracture génération elle de paysans dans le Jura, à propos des éoliennes. Outre son talent de conteur, Eric Fottorino a bien compris à quel point il existe aujourd’hui un lobby industriel de l’éolienne, qui remplace en quelque sorte celui qui a équipé les paysans de tracteurs énormes, de moissonneuses-batteuses toujours plus grandes, etc. Une génération de paysans qui a hier surinvesti dans la mécanique et la chimie se tourne aujourd’hui vers l’éolienne, perçue aujourd’hui comme un nouveau moyen de valoriser industriellement les terres agricoles, tandis que la génération nouvelle, sensible aux thèses écologistes et à l’agriculture biologique, y est réticente. C’est subtil, car on sait que les éoliennes sont une grande revendication écologiste, mais Fottorino nous montre que ce n’est pas forcément le cas pour les entreprises qu’il y a derrière. "


13 novembre

Michaela Wiegel, créée le 05-09-2021

"Alors que s’ouvre le procès des attentats du 13 novembre 2015, je voulais vous recommander un livre intitulé 13 novembre, résultat d’un programme à mon avis unique dans l’histoire mémorielle, à l’initiative (entre autres) du CNRS, qui regroupe un millier de témoignages étalés dans le temps. L’ouvrage est l’un des premiers résultats de ce travail sans précédent. Par rapport à la multitude de récits déjà existants, très prenants, ce travail offre un certain recul, avec un déroulé très précis. Le livre est très complet, et les bénéfices de la vente financent intégralement ce programme de recherche sur la mémoire."


Poussière dans le vent

Matthias Fekl, créée le 05-09-2021

"Je conseille le dernier roman de l’écrivain cubain Leonardo Padura, qui a déjà signé L’homme qui aimait les chiens, ainsi qu’un cycle de romans policiers qui permettent de comprendre le Cuba d’aujourd’hui. C’est un auteur extraordinaire, c’est également un homme très désabusé sur la situation de son pays, où il vit toujours, dans les quartiers populaires de La Havane. Dans ce roman, on touche un aspect qu’il n’avait pas encore exploité dans son oeuvre : les rapports entre les Cubains de Cuba et les Cubains exilés, en particulier à Miami. Comme toujours, on trouve une galerie de personnages aussi humains que finement décrits, ainsi que beaucoup de désillusions, d’humanité et de générosité."


Lake success

Lucile Schmid, créée le 05-09-2021

"Je vous recommande ce roman de Gary Shteingart. L’auteur est américain, mais né en URSS en 1972, et arrivé aux USA à l’âge de sept ans. L’histoire se déroule pendant l’été 2016, juste avant l’élection de Donald Trump. Le héros est un multimillionnaire qui, à la suite d’une dispute conjugale, décide sur un coup de tête, en pleine nuit, de prendre un bus en direction du Nouveau-Mexique. Il va ainsi rencontrer l’Amérique qui va voter Trump, ce qui ne serait jamais produit sans ce voyage imprévu.Pendant ce temps, sa merveilleuse épouse new-yorkaise entame une liaison avec un écrivain qui pourrait bien être un double de l’auteur. Passionnant, et plein d’humour."




La société écologique et ses ennemis / L’âge productiviste / La cité écologique

Lucile Schmid, créée le 04-07-2021

"Je vous recommande de lire ou relire la trilogie du philosophe et historien Serge Audier. Il écrit depuis déjà longtemps sur la façon dont l’écologie traverse l’histoire des idées à gauche. Cette trilogie a commencé en 2017, et l’année dernière, Serge Audier a osé un livre plus programmatique. C’est l’une des premières fois que je m’aventure moi aussi sur le terrain de la République, et je trouve intéressant que l’auteur aborde les limites de l’écologie politique, telle qu’elle est notamment incarnée par les Verts, avec l’idée que, comme elle a toujours été incarnée par une minorité, elle n’a jamais vraiment abordé la question de l’exercice du pouvoir. Comment les écologistes pourraient-ils s’emparer des institutions et cesser de ne se voir que comme un contre-pouvoir ?"


Ennemis héréditaires ?

Marc-Olivier Padis, créée le 04-07-2021

"J’ai lu avec beaucoup d’intérêt un dialogue franco-allemand entre deux historiens : Hélène Miard-Delacroix et Andreas Wirsching. Ils dialoguent sur les relations franco-allemandes, essayant de lever des malentendus et de mieux faire comprendre nos histoires respectives. C’est très plaisant à lire, très vif, et on se rend compte à quel point la constitution même de la nation allemande dépend de l’Histoire française, et des agressions successives de la France. Leur conversation va jusqu’à la période contemporaine, et nous laisse voir tout le chantier qu’il y a encore à mener dans le dialogue franco-allemand."


Napoléon l’exposition

David Djaïz, créée le 04-07-2021

"Je profite de cette redondance pour faire une deuxième recommandation : allez visiter la très belle exposition Napoléon à la grande halle de la Villette. Je n’ai pas une sympathie démesurée pour le personnage, je partage le jugement du général de Gaulle, qui faisait remarquer qu’il avait rendue la France plus petite qu’il ne l’avait prise, mais c’est très bien mis en scène, il y a beaucoup de pièces très intéressantes, on peut par exemple y voir la magnifique scène inaugurale du Colonel Chabert, avec la légendaire charge de cavalerie, l’une des plus meurtrières de la Grande armée. "


Cosmogonies. Zinsou, une collection africaine / Marylin Minter : all wet / Betty Tompkins : raw material

Lionel Zinsou, créée le 04-07-2021

"Je vous recommande une visite à Montpellier, au musée d’art contemporain, le Mo.Co. J’y ai vu deux expositions. La première est purement narcissique, il se trouve qu’elle est consacrée à l’art contemporain africain. Comme elle s’appelle « Zinsou » je ne la commenterai pas, et ne vous dirai pas à quel point elle est bien faite et éclairante. Je mettrai donc l’accent sur un autre bâtiment, la panacée, qui appartient au même musée. On peut y voir une exposition féministe de deux américaines travaillant avec de passionnantes techniques d’acrylique sur le corps féminin. Leur travail part de dessins et de photos pornographiques, l’exposition est donc interdite aux mineurs non accompagnés, elle vient d’ouvrir et n’a pas encore eu le temps de faire scandale."


Le peuple du Larzac

David Djaïz, créée le 04-07-2021

"Ce n’est pas par fayotage, mais il se trouve que je voulais vous recommander cette semaine le même livre que Philippe. Quand j’ai vu le sous titre : « une histoire de crânes, sorcières, croisés, paysans, prisonniers, soldats, ouvrières, militants, touristes et brebis », cela m’a beaucoup attiré. Effectivement, j’avais du Larzac cette image d’un plateau où une horde de normaliens barbus étaient venus protester dans les années 1970 contre l’extension du camp militaire. Artières nous montre que ce territoire est un bouillons culture depuis bien plus longtemps que cela."