Mélenchon, la gauche et la République / Royaume-Uni : où vont les Conservateurs ? / n°324 / 19 novembre 2023

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MÉLENCHON, LA GAUCHE ET LA RÉPUBLIQUE

Introduction

ISSN 2608-984X

Philippe Meyer :
Après l'attaque du Hamas contre Israël, le refus de Jean-Luc Mélenchon de qualifier le Hamas d'organisation terroriste a creusé un peu plus le fossé avec les autres composantes de la Nupes et fracturé son propre parti. Les « frondeurs » du mouvement s’opposent désormais ouvertement à lui tandis qu’un collectif de 420 militants réclame une « refondation du mouvement », en plaidant pour « une VIème République à La France Insoumise ». Les communistes ont tourné la page de la Nupes, suivis par le mouvement Génération Écologie et les socialistes ont déclaré un « moratoire » en attente d'une « clarification ». En matière de politique internationale, tout ou presque oppose LFI aux autres partis de gauche : la Russie et l’Otan, l’Ukraine, la Palestine et Israël, la Chine, le Tibet, Taïwan aussi bien que le soutien mélenchoniste aux dictatures « socialistes » latino-américaines. Alors que LFI est une force eurosceptique, les autres formations sont europhiles (le Parti communiste français est dans une position intermédiaire).
Lors de la séquence des retraites, en choisissant une stratégie de l'obstruction à tout débat, Jean-Luc Mélenchon a brusqué le reste de la gauche et une partie du front syndical uni. En septembre 2022, son soutien à son lieutenant Adrien Quatennens, condamné pour violences envers son épouse, avait fait s'interroger de nombreuses personnes, y compris dans son propre camp. La semaine dernière la députée de Seine-Saint-Denis, Raquel Garrido, qui avait accusé Jean-Luc Mélenchon de nuire à LFI, a été suspendue pour quatre mois de son rôle d’oratrice à l’Assemblée nationale.
Intransigeant « laïcard » à ses débuts, Jean-Luc Mélenchon, s'est mué en pourfendeur de « l'islamophobie ». Une partie de la classe politique juge qu'il serait sorti du « champ républicain », et trouve des traces d’antisémitisme dans ses innombrables tweets.
Pour le politologue Jérôme Fourquet, « comme La France insoumise a fait des quartiers populaires peuplés de descendants de l'immigration son socle électoral, il y a une tentation d'axer sur le civilisationnel, voire le religieux ». Selon un sondage Cevipof-OpinionWay après le premier tour de la présidentielle de 2022, 68 % des Français musulmans ont voté pour Jean-Luc Mélenchon.
Au sortir de la présidentielle de 2017, il était la personnalité préférée des Français avec 61 % de bonnes opinions selon l'Ifop. Désormais, selon un sondage CSA pour CNews, 71 % des Français voient en lui un « danger pour la démocratie ». L'institut Odoxa qui interroge les Français sur la personnalité qui leur inspire le plus de « rejet », le place aujourd’hui, avec 62%, comme la personnalité la plus rejetée de France, devant Éric Zemmour.

Kontildondit ?

Isabelle de Gaulmyn :
Je trouve intéressant de pouvoir parler de Jean-Luc Mélenchon sérieusement, ce qui n’est pas fait souvent dans le paysage médiatique actuel. A son propos, on entend généralement des jugements hâtifs : « il est fou », ou ces jours-ci : « il est antisémite ». Or c’est plus compliqué que cela. Personnellement, même si les chances de réussite de sa tactique me laissent perplexe, je ne le crois pas fou. En tous cas son comportement est assez significatif de ce qui est en train de se passer sur la scène politique française.
Sur le plan international, la gauche a toujours été divisée, avec ceux qui comme M. Mélenchon, sont si opposés aux Etats-Unis qu’ils en viennent à défendre la Russie, qui ne sont pas pro-européens, etc. Ensuite, il y a la tentation d’instaurer de manière durable un populisme de gauche, un peu à la manière dont Jean-Marie Le Pen avait instauré un populisme de droite, et toujours avec l’outil incontournable des populismes : la volonté de paraître anti-système. On l’a vu à l’occasion de la réforme des retraites, c’est un positionnement qui assure une certaine popularité. Enfin, il y a ce côté « ancien trotskyste », qui pense que nous sommes dans une période pré-révolutionnaire, et donc que l’heure est à la conflictualité. Il va s’agir de cliver le plus possible.
Ce n’est pas non plus la première fois que cette gauche se prononce en faveur de systèmes dictatoriaux ou totalitaires. Je me souviens qu’il y avait toute une gauche qui trouvait que la révolution iranienne était formidable, qu’elle libérait les pauvres prolétaires musulmans, etc. Il en va un peu de même avec le Hamas : sous prétexte de défendre les « damnés de la terre », on s’acoquine avec l’indéfendable.
Il y a également un calcul électoral, à cause d’un fait intéressant : LFI est l’un des rares partis (avec notamment le RN) à toucher les classes populaires, et les jeunes. LFI, c’est l’anti-manifestation de dimanche dernier (dont j’ai fait partie), qui était effectivement constituée en majorité de gens blancs, plutôt âgés, plutôt aisés, et plutôt parisiens. LFI a eu dans ses débuts un électorat assez « bobo », et on voit bien qu’aujourd’hui c’est en train de changer : davantage de jeunes, de gens modestes, et de gens issus de l’immigration.
Enfin, on constate à quel point la laïcité a bougé en tant que marqueur de la gauche et de la République. Jean-Luc Mélenchon lui-même est le parfait symbole de ce déplacement. Mais au fond, est-ce lui ou la laïcité qui a évolué ? L’évolution de Mélenchon est compréhensible pour des raisons électorales, mais il me semble aussi qu’il y a une nouvelle forme de laïcité, beaucoup plus à droite qu’auparavant, une « laïcité CNews » en quelque sorte, c’est à dire une laïcité séparatiste, qui a tendance n’être plus qu’un outil anti-musulmans, servant mettre une partie d’entre eux en dehors de la société. C’est par rapport à cette laïcité très à droite que doit être examinée la position de Jean-Luc Mélenchon. Certes, il ne faut pas pour autant l’idéaliser, elle comporte les dangers que l’on sait, mais ce glissement de la laïcité est intéressant à observer, ainsi que la façon dont Jean-Luc Mélenchon parvient à surfer dessus.

Michel Eltchaninoff :
Non seulement Jean-Luc Mélenchon n’est pas fou, mais ce qui se passe aujourd’hui à LFI et à la NUPES n’est que la suite logique de son identité politique, dans laquelle je vois trois éléments.
Le conflit comme méthode, d’abord. Ses grands inspirateurs philosophiques sont Chantal Mouffe et Ernesto Laclau : au lieu d’une vision associative de la politique, d’une discussion en direction d’un consensus démocratique, il faut être dans l’âgon, la confrontation. M. Mélenchon disait que « l’action politique progressiste doit conflictualiser tout ce qu’elle touche ». Il faut créer du conflit, et de l’inimitié dès qu’on s’exprime. Ses propos sont donc polémiques par essence. Ses tweets depuis le 7 octobre, même s’ils sont de plus en plus gênants et tragiques, découlent de cette logique.
Le populisme autoritaire, ensuite. C’est à dire l’idée selon laquelle M. Mélenchon incarne le peuple. On se souvient de son « la République, c’est moi » il y a quelques années, devenu aujourd’hui « c’est moi le peuple ». Et le peuple ne peut pas se tromper, et il est en colère. Comme ses modèles des dictatures socialistes d’Amérique latine, Jean-Luc Mélenchon est celui qui exprime les affects du peuple. « Quand les gens me voient à la télévision, ils ne retiennent pas forcément ce que je dis, mais ils se souviennent que je n’ai pas baissé les yeux », rappelle-t-il souvent. C’est pour cela qu’on ne peut pas se « débarrasser » de lui politiquement : il n’a pas de mandat électoral, et comme il prétend incarner le peuple, il ne se laissera pas faire.
Le mythe, enfin. Remplacer la rationalité et l’argumentation par une mythologie. Qu’elle soit révolutionnaire, robespierriste ou sud-américaine. Là encore, le mythe ne peut pas être éliminé ou écarté par une discussion démocratique.
La radicalisation de M. Mélenchon depuis le 7 octobre n’est qu’apparente, elle est en réalité la suite logique de son identité. De plus, ses opposants au sein de LFI ou de la NUPES ne pourront s’en débarrasser sans l’affronter directement. Il ne partira pas de lui-même. J’ai regardé très attentivement une vidéo qu’il a publiée mercredi dernier d’une cinquantaine de minutes, dont l’objectif est de justifier ses propos. Il dit qu’il va prendre de la hauteur, que son argumentation sera rationnelle, et qu’il va examiner les choses avec profondeur. Donc après avoir joué l’agressif, il endosse le rôle du vieux sage, c’est une de ses habitudes. Dans cette vidéo, il ne dit au fond qu’une seule chose : qu’il avait raison avant tout le monde, quand il a fait son tweet à propos du 7 octobre, dans lequel il disait que la violence exercée par les uns n’était qu’une réponse à la violence des autres, c’est à dire quand il a mis dos à dos les Israéliens et les terroristes du Hamas.

David Djaïz :
Il est d’abord frappant de voir qu’avec la gauche française, tout sujet grave, qu’il soit national ou international est un prétexte à afficher ses divisions. Qu’on parle du conflit israélo-palestinien, de l’Ukraine, de la Syrie, de l’Europe, du capitalisme, de la démocratie libérale, de la laïcité, de la décentralisation, immanquablement, on a des articles sur la « fracture de la NUPES ». Premier réflexe face à cela : s’étonner que ces gens, qui pèsent de moins en moins d’un point de vue électoral, se paient encore le luxe d’afficher leurs divisions à tout propos. La réalité est que ce qui unit cette famille politique aujourd’hui, c’est surtout un accord électoral, ce sont des circonstances et non des idées. Je crains que la NUPES ne soit pas autre chose. Il y a des désaccords fondamentaux, qui touchent à la démocratie libérale, à l’économie de marché, à la nation et à l’Europe, et au systèmes d’alliances dont fait partie la France.
Jean-Luc Mélenchon n’est qu’un produit de la société de polarisation politique croissante, très bien décrite par Giuliano Da Empoli dans Les ingénieurs du chaos. Produit efficace, assez cynique, loin du portrait-robot des ingénieurs du chaos, à savoir l’alliance d’un comique de télévision avec des start-uppers très rôdé dans la communication digitale (à l’image du mouvement Cinque Stelle italien). Mélenchon n’est ni l’un ni l’autre, c’est un sénateur socialiste en cravate, rompu aux joutes parlementaires, apparatchik en diable. Mais il s’est très bien grimé en agent de cette société de polarisation. Il est caractérisé par au moins deux traits : d’abord il est mouvementiste/ Pour avoir longtemps été dans la minorité, il a expérimenté le caractère pesant des motions, des palabres internes, la lenteur de la démocratie partidaire. Alors que le mouvementisme (trait qu’il partage avec Emmanuel Macron) c’est l’efficacité, la vitesse, et la solitude de l’homme providentiel. Et puis il y a une dimension algorithmique, c’est à dire une excellente compréhension de ce qu’est la mobilisation politique à l’ère des réseaux sociaux. Il faut proférer des énormités pour sortir du lot. Cela assure une audience, selon la maxime de Pasolini : « je hais l’indifférence ». En grossissant le trait, on radicalise une base. C’était exactement sa stratégie pour la présidentielle de 2022. Il sécurise ainsi 8% à 10% de l’électorat, authentiquement séduit par son discours, et ensuite, grâce à ce pôle de force, il agrège le reste de la gauche. Si l’on décompose les 22% du premier tour, on y trouve en réalité 8% à 10% de vrais populistes, et derrière eux, des socio-démocrates bon teint, qui ont voté pour lui parce qu’ils voulaient voter à gauche.
Il ne fait que continuer à appliquer cette stratégie en vue de la présidentielle de 2027 : radicaliser un noyau, et ratisser le reste. C’est exactement l’inverse de la stratégie de François Ruffin, mais je crains qu’à l’heure des « ingénieurs du chaos », ce ne soit la plus payante.

Jean-Louis Bourlanges :
Jean-Luc Mélenchon apporte aussi au paysage politique actuel un certain nombre de contradictions. Mais depuis Hegel, chacun sait que la dialectique fait vivre, et que la contradiction ne freine en rien un parcours politique. J’en vois trois très importantes chez le leader des Insoumis.
D’abord, celle de son discours institutionnel, qui prône un effacement du président de la République, et un rétablissement de la démocratie parlementaire de type classique. Grosso modo, c’est la République de 1958, moins un certain nombre de rigueurs (comme l’article 49.3), et avec la marginalisation totale du président de la République. Ce n’est pas illogique du tout, c’est un système qui n’est pas réaliste (car je souhaite bien du courage à quiconque proposerait aux Français de cesser d’élire leur président au suffrage universel) mais c’est cohérent. Or, tout en lui nie ce projet. La preuve : à l’occasion des législatives de 2022, pour être Premier ministre (et ainsi neutraliser le président), il eut été rationnel d’être candidat à la députation. Et il n’en a rien fait. Il s’est placé dans une position de recours, celle d’un héros providentiel. C’est à dire le contraire même de ce qu’il propose dans sa VIème République.
Ensuite, la contradiction entre ses deux idéologies successives. Il y eut pour commencer l’hyper-laïcité, avec une proposition d’interdiction du voile islamique il y a quelques d’années. C’est le contraire absolu de la théorie qu’il défend aujourd’hui. Tous les arguments d’il y a vingt ans sont repris et entièrement retournés aujourd’hui, mais avec la même véhémence de conviction et d’indignation.
Troisième contradiction : Mélenchon était l’homme de l’anti-américanisme absolu. Il défendait par exemple l’attitude de la Chine envers le Tibet au nom de la laïcité. C’était une tradition universaliste profondément française. Son renouveau idéologique est désormais presque intégralement puisé dans la gauche américaine. Le wokisme est très commode, il consiste à substituer ce qu’on est à ce qu’on pense. C’est ce que vous êtes vous rend légitime ou non, pas ce que vous dites ou faites. D’autre part, le wokisme est un manichéisme : toutes les différences doivent s’agréger dans une opposition entre dominants et dominés. Bref, c’est un simplisme idéologique que Mélenchon récupère.
Il y a cependant quelques continuités. D’abord, la recherche de la plus grande radicalité possible. Du temps où cette place « du plus radical » était occupée par le PCF, la radicalité portait sur la question économique et sociale. Elle est devenue tout à fait différente, nichée dans la protestation identitaire. Sur le Moyen-Orient, c’est frappant. Le Hamas (sunnite) c’est rapproché du Hezbollah et des propositions chiites, à cause de la préférence pour la radicalité, par rapport au dogme. Cette préférence pour la radicalité se retrouve chez Mélenchon, mais aussi parmi les jeunes générations, adossées à aucune idéologie, qui vivent avec anxiété leur participation à la vie publique, et ont tendance à la surenchère.
Est-ce que cela peut fonctionner ? Un fond radical est indéniablement une base solide, mais personnellement, je pense qu’il sera extrêmement difficile de le faire fonctionner durablement. A cause du caractère même de Jean-Luc Mélenchon, visible pour tous, et qui à mon avis fait peur. Ce vieux peuple français, prudent, sceptique et n’aimant pas mettre tous ses œufs dans le même panier, y regardera à mon avis à deux fois avant de donner le pouvoir au dirigeant d’un parti dans lequel on n’a pas le droit de critiquer le chef … Jean-Luc Mélenchon semble s’enfermer dans une impasse. Qui n’est cependant pas un désert.

Philippe Meyer :
Et puis, pour répondre à la question « est-ce que cela peut fonctionner ? », notons que certains élus LFI ont un électorat très « nouvelle bourgeoisie », à Paris par exemple. C’est précisément cette bourgeoisie là qui me semble avoir peur désormais de Jean-Luc Mélenchon. S’il y avait demain des élections législatives, je doute que des gens comme Aymeric Caron ou Danièle Obono soient réélus.

Isabelle de Gaulmyn :
La radicalité politique fleurit partout dans le monde, cette façon d’être anti-système devient un système. Il y a désormais une tendance au discours radical et excessif, mais contrairement à Jean-Louis, je ne crois pas que cette fuite en avant soit due à un vide idéologique. Si l’on prend par exemple les écologistes, il y a quelque chose de construit derrière des prises de position parfois très radicales.

Jean-Louis Bourlanges :
Je suis d’accord à propos de l’écologie. On peut penser ce qu’on veut des positions, mais elles reposent effectivement sur une base solide. Mais Mélenchon n’a jamais été cela, je l’ai connu très pro-nucléaire, par exemple. Il y a chez lui un opportunisme idéologique.

Michel Eltchaninoff :
Il passe d’un personnage à un autre. Son discours est très dur et très clivant quand il s’adresse à des radicaux, et très différent quand il s’adresse à de jeunes instruits qui votent pour lui par souci écologique ou institutionnel. Dans ces cas là il est très posé, comme dans le cas de cette vidéo citée plus haut, qui est très significative. Successivement cassant ou caressant. Il s’agit de plaire à la fois à des gens très en colère et à des gens à qui la colère fait peur.

Philippe Meyer :
Je ne crois pas non plus qu’il soit « fou » mais je reconnais me demander parfois si l’importance médiatique dont il jouit ne lui fait pas un peu trop tourner la tête. Certaines de ses déclarations sont tout bonnement grotesques.

David Djaïz :
Ou quand il destitue des compagnons de route de 20 ans, comme Raquel Garrido ou Alexis Corbière, pour les remplacer par des jeunes qui lui sont dévoués presque fanatiquement, on ne peut pas s’empêcher de déceler quelques tendances paranoïdes … Il n’y a pas d’alliés, que des ralliés, qu’on remplace à intervalle régulier.

Isabelle de Gaulmyn :
Et le système médiatique favorise ces outrances. Aujourd’hui, plus les propositions sont excessives, plus on est invité sur les plateaux …

ROYAUME-UNI : OÙ VONT LES CONSERVATEURS ?

Introduction

Philippe Meyer :
Le parti Conservateur au pouvoir au Royaume-Uni a subi, le 20 octobre, une sévère défaite lors de deux élections partielles face au parti travailliste. Ces deux scrutins se tenaient au moment où la cote du Premier ministre, Rishi Sunak, qui s'efforce de se présenter comme une incarnation du changement bien que son parti soit au pouvoir depuis 13 ans, est au plus bas depuis son arrivée à Downing Street il y a près d'un an. Les sondages récents donnent une avance de 17 à 20 points au Labour. À l’actif du Premier ministre : le rapprochement avec le continent, symbolisé par la signature d’un accord augmenté sur l’Irlande du Nord en février, le ralentissement de l’inflation observé ces derniers mois et la baisse d’un tiers du nombre de traversées de la Manche, en partie grâce à la signature d’un accord de renvoi des Albanais déboutés de l’asile vers leur pays d’origine. La volonté politique de limiter l’immigration se heurte toutefois à la réalité des besoins économiques. En l'occurrence, ceux d'un pays qui connaît de graves pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs comme l'agriculture, l'hôtellerie-restauration, le bâtiment, le transport routier, les hôpitaux ou l'aide à domicile. Des métiers boudés par les « White British », occupés par les Polonais, les Roumains et les Bulgares avant que le Brexit les en chasse sans ménagement. L’économie demeure morose et The Guardian dénonce une nouvelle forme de pauvreté, créée par les Tories : l’an passé 3,8 millions de personnes étaient dans la misère au Royaume-Uni, l’équivalent de la moitié de la population de Londres incapable de se nourrir, se vêtir, et se chauffer. Un chiffre qui a doublé au cours de ces cinq dernières années.
Le 7 novembre, le gouvernement britannique a dévoilé ses projets pour combattre la criminalité et relancer la croissance économique. Le Premier ministre Rishi Sunak s'est employé à se démarquer du parti travailliste, en misant sur le durcissement des peines pour les auteurs d'infractions violentes et en révisant à la baisse les objectifs du pays en matière de climat, présentés comme un fardeau pour les ménages.
Le 13 novembre, le Premier ministre a créé la surprise, en rappelant au gouvernement son prédécesseur David Cameron, l'homme du référendum du Brexit, comme chef de la diplomatie. Attendu depuis des mois, un changement du gouvernement conservateur semblait inéluctable pour renvoyer la très à droite ministre de l'Intérieur Suella Braverman, dont les critiques formulées à l'encontre de la police la semaine dernière ont constitué la provocation de trop. Au Home Office, elle est remplacée par l'ex-chef de la diplomatie James Cleverly, qui devra assumer une politique très restrictive sur le droit d'asile. Mercredi, la Cour suprême britannique a confirmé l'illégalité du projet controversé d'expulser vers le Rwanda les demandeurs d'asile, d'où qu'ils viennent, arrivés illégalement sur le sol britannique.

Kontildondit ?

David Djaïz :
Si on le compare aux autres grandes démocraties européennes, le système politique britannique est d’une remarquable stabilité. En France, nous avons vu les partis politiques s’effondrer en 2017. En Espagne, tout le monde peut voir les contorsions dans lesquelles se débat Pedro Sánchez : il en est à gracier les indépendantistes catalans pour récupérer sept voix au Parlement. En Allemagne, on constate un émiettement considérable de la vie politique. Au Royaume-Uni, en revanche, la vie politique reste structurée par ses deux grands partis traditionnels : le Labour et les Tories, et le parti d’appoint, les Liberal Democrats (« Lib Dems »). Et même le Brexit, qui fut pourtant une question existentielle pour le peuple britannique, a été digéré par ce système partisan. Je ne suis pas certain que si nous avions demain un bouleversement pareil en France, nous garderions la même vie politique. On pouvait tout à fait imaginer qu’un parti pro et un parti anti Brexit allaient émerger au R-U, or cela n’a pas été le cas. Cette stabilité politique tient à la force des institutions parlementaires de cette vieille et rassurante démocratie britannique.
Rishi Sunak paie les pots cassés par ses prédécesseurs au 10 Downing Street. Après une quinzaine d’années de domination, les Conservateurs n’échappent pas à l’usure politique, on l’a vu lors des législatives partielles. L’opposition est est à nouveau décente, Keir Starmer est un leader de qualité, prêt à gouverner, il a fait sa mue sur les questions écologiques et n’est pas dans les mêmes gênantes embardées idéologiques de son prédécesseur Jeremy Corbyn.
C’est d’une certaine façon assez injuste pour Rishi Sunak : après la catastrophe de Liz Truss, qui a gouverné moins d’une cinquantaine de jours, il a plutôt bien agi selon les critères Conservateurs. C’est un banquier d’affaires, un « premier de la classe », il présente bien, semble travailler 18 hures par jour, bref il a un peu le « syndrome Macron » : il ne comprend pas très bien pourquoi les gens ne l’aiment pas alors qu’il a l’impression de tout faire correctement. A quelques mois des élections générales, il est donc condamné à essayer de rattraper un retard considérable dans les sondages. Et il faut bien avouer que sa stratégie est incompréhensible. D’un côté il appelle David Cameron aux Affaires étrangères pour plaire à la branche libérale de son électorat (pour parler à la City, en somme). Car M. Sunak avait beaucoup choqué dans certains domaines, par exemple, à propos de l’écologie. Boris Johnson avait à ce sujet une politique souverainiste, mais très ambitieuse : il misait sur l’industrie verte, et avait annoncé des mesures très strictes et très rapides. Rishi Sunak a fait marche arrière, il a desserré l’étau en repoussant par exemple de cinq ans l’interdiction de vente des véhicules thermiques. Ce faisant, il s’est brouillé avec la jeunesse et les franges les plus éduquées. L’embauche de David Cameron visait à rattraper un peu cela. Il s’agissait d’envoyer un signal aux libéraux et aux europhiles.
Mais dans le même temps, Rishi Sunak fait un programme très à droite, où le durcissement est partout : sur la politique migratoire, sur la politique pénale, on permet la recherche d’hydrocarbures … Ces signaux contradictoires nous font voir qu’il est en réalité dans la même errance idéologique que les Conservateurs de tous les autres pays d’Europe, pris en étau par la droite extrême.

Michel Eltchaninoff :
Le système des partis a tenu bon, mais si le Brexit a été « digéré », il faut reconnaître qu’il passe mal. Quand je regarde cette extraordinaire aventure des Tories depuis quatorze ans, je ne peux m’empêcher de penser aux comédies romantiques britanniques à succès, comme Quatre mariages et un enterrement. Ici, c’est plutôt « Quatre divorces et un remariage ». Tout y est, notamment les personnages hauts en couleurs. Le jeune premier, riche, ambitieux, en pleine crise existentielle (Rishi Sunak) ; la fille d’immigrés, caractérielle et provocatrice (Suella Braverman), l’ex malchanceux qui ressort du placard (David Cameron), et toute une série de personnages pittoresques, de Christopher Pincher (ancien ministre accusé de comportement sexuel inapproprié) au fantasque Boris Johnson, amateur de soirées clandestines. La dernière péripétie en date, le « remariage », est le retour surprise de David Cameron. C’est aussi un retour aux origines, puisque c’est lui qui avait provoqué le référendum du Brexit, et donc le premier « divorce » entre Leavers et Remainers. Ensuite, il y eut le long et pénible deuxième divorce entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Le troisième fut entre Boris Johnson et son parti, et enfin le quatrième, entre Rishi Sunak et sa ministre de l’Intérieur indocile. La boucle est bouclée, le scénario est tout à fait divertissant.
On s’interroge tout de même sur la fin du film : d’ordinaire, les comédies de ce genre finissent bien. Rishi Sunak entend clore un épisode de conduite irrespectueuse, aventuriste et irresponsable, en faisant revenir quelqu’un de sérieux, de libéral, qui va plaire aux modérés et aux pragmatiques. Mais est-ce un bon calcul ? Car ce retour va sans doute ressouder l’opposition interne aux Tories, peut-être autour de Suella Braverman. Et puis lors des prochaines élections, dans un an, on proposera donc aux électeurs le choix entre un travailliste qui s’est recentré et un conservateur modéré ; il y a donc ce fortes chances que cela libère les extrêmes des deux côtés. On sait que le Labour n’en a pas encore fini avec les questions d’antisémitisme : huit membres du cabinet fantôme du parti viennent d’être exclus après des déclarations pro-palestiniennes. Et il reste un dernier ingrédient au scénario, tout à fait britannique lui aussi : un fantôme. En l’occurrence celui du Brexit. Même si les dissensions au sein des Tories ont toujours existé, le retour de Cameron pourrait les raviver. Le film n’est pas terminé, peut-être y aura-t-il aussi un « enterrement » politique … Celui du parti Conservateur ?

Isabelle de Gaulmyn :
Il faut bien reconnaître que les anti-européens britanniques font face à une sacrée faillite. Si on se souvient des raisons pour lesquelles le Brexit avait été voté, il y avait : arrêter l’immigration, et sauver l’industrie britannique. Or sur ces deux fronts, la situation du Royaume-Uni est catastrophique. C’est donc complètement raté.
Le système politique a tenu face au Brexit, mais désormais la question n’est plus « leave » ou « remain » (comme le prouve le retour de David Cameron), mais plutôt, comme le remarquait David, le durcissement de la droite conservatrice. Comment le système parlementaire britannique va-t-il résister à cela ? On a vu qu’aux Etats-Unis, cela n’a pas vraiment tenu, une guerre culturelle est en cours, contre le wokisme, contre les immigrés, contre le multiculturalisme ... Il y a beaucoup d’outrances et d’excès … Le système britannique finira-t-il par rompre, ou bien est-ce que cela conduira, comme aux Etats-Unis, à un blocage politique ?

Jean-Louis Bourlanges :
Le Brexit est un immense malentendu, dont l’ombre portée pèse encore très lourdement sur le Royaume-Uni. Qu’on soit pour ou contre l’Union européenne, il faut bien reconnaître que les Britanniques avaient géré leur adhésion avec une habileté remarquable, se soustrayant à toutes les contraintes pour ne garder que ce qui les avantageait. Le Brexit a donc été une insulte au savoir-faire et au professionnalisme de la diplomatie britannique. Et depuis qu’il est effectif, on se rend compte à quel point ce combat était illusoire. Qu’il s’agisse de l’immigration ou de l’économie, c’est en effet un échec complet, mais d’une façon générale, l’idée d’une Greater Britain, ou d’une Global Britain, a volé en éclats. L’idée que le pays allait commercer avec tout le monde, sauf ses voisins géographiques a fait long feu. Le Royaume-Uni, sous quelque angle qu’on l’examine, va indéniablement moins bien depuis le Brexit.
Et comme les Britanniques sont un peuple tenace et orgueilleux, ils ont eu énormément de difficultés à accepter ce faux pas. Ils se sont obstiné dans ce choix, malgré toutes les déconvenues. Les fantasmes de Johnson ont abouti à la dénonciation de tous ses mensonges, l’échec de Liz Truss (43 jours !) … Le meilleur marquage symbolique du fiasco du Brexit vient de la famille royale elle-même. Le fait que le Roi Charles ait choisi des pays européens pour ses premières visites officielles était tout à fait significatif. Le point culminant de tout ces paradoxes est le retour de David Cameron. Comme le disait Michel : un revenant.
Il est extrêmement difficile de savoir ce que représente Cameron politiquement, car c’est l’image d’un échec qui lui est accolée avant tout. Comment construire quoi que ce soit de viable à partir de cela ? Le parti Conservateur a échoué sur tous les plans. Aussitôt après le Brexit, il y eut une phase où le grand modèle idéologique était Joseph Chamberlain (indépendant, mais proche des Tories) : une démocratie sociale fondée sur l’Etat-providence, le rattrapage des classes moyennes … Tout cela a été complètement noyé, ce fut un échec total, qui a enterré plusieurs Premiers ministres, et gêne énormément Rishi Sunak.
Il y a cependant une chose qu’il ne faut pas oublier : l’influence du Moyen-Orient, qui perturbe la gauche britannique tout autant que la gauche américaine. Le parti Travailliste est profondément divisé sur la question palestinienne, alors qu’aujourd’hui le parti Conservateur soutient entièrement Israël (comme les Républicains étasuniens). Cette fragilité-là va peser sur les résultats de la gauche, et deviendra de plus en plus encombrante pour les Travaillistes si la situation au Moyen-Orient continue de se dégrader.

Les brèves

Le livre des amis

Philippe Meyer

"Je recommande ce tout récent ouvrage de Jean Clair, édité par Gallimard. C’est une plongée dans l’art du dernier demi-siècle, d’Alechinsky à Xavier Valls en passant par Louise Bourgeois, Lucian Freud, David Hockney, Henri Cartier Bresson, Balthus, Roseline Granet ou Raymond Mason. Clarté du style, fermeté du propos, intimité avec les œuvres et, le plus souvent, avec les artistes, Le Livre des amis fait partie des lectures dont on sort reconnaissant à l’auteur de nous avoir donné un regard mieux informé, une compréhension plus riche et un appétit d’aller y revoir. Les serviteurs de l’art ont leur place dans ce recueil chaleureux. Le portrait du galeriste Claude Bernard, disparu en 2022 « l'un des derniers marchands dans sa profession qui ont su garder le sens et la dignité de leur métier, quand tout le marché de l'art se constituait comme un gigantesque marché à la criée, soutenu par des organismes officiels comme les FRAC constituant non des réserves mais des débarras toujours plus vastes des productions éphémères de l'art actuel » Non loin de celui de Claude Bernard, on trouvera Françoise Cachin, la première directrice d’Orsay, puis des Musées de France, fonction dans laquelle elle fit un remarquable travail en faveur des musées de province. Jean Clair rappelle avec admiration l'exposition « Images d'une métropole, les impressionnistes à Paris. Il s'agissait bien sûr de plus que des impressionnistes elle commence avec Corot pour finir avec Matisse. Mais surtout elle montre, mêlée aux maîtres, de Manet à Caillebotte, des œuvres peu connues, de Maximilien Luce à Devambez, d'Adler à Louis Anquetin, qui donne de Paris une image bien éloignée de la vision traditionnelle de la ville lumière, celle d’une ville industrielle et pauvre, avec les cheminées d'usine, les fumées des locomotives et les gazomètres, avec les foules en fureur, les défilés, les émeutes ouvrières … Jean Clair célèbre aussi le courage avec lequel Françoise « s’opposa dans un silence embarrassé puis hostile contre la dérive mercantile des musées qui les voient assimiler les œuvres patrimoniales qu'ils ont la charge de conserver, d'étudier et de faire connaître à de simples marchandises que l'on peut vendre ou bien louer comme s'il s'agissait de réserves naturelles de pétrole ou de champs de patates. »"

Raymond Aron

Jean-Louis Bourlanges

"Il y a quarante ans disparaissait Raymond Aron. C’est certainement l’homme qui m’a le plus influencé, je lui dois très largement tout ce que j’ai fait de meilleur, et sa pensée a structuré toute ma vie politique. Et il me semble qu’elle nous est encore essentielle aujourd’hui. Aron nous a appris trois choses : que si la politique était la lutte pour le pouvoir, le conflit, la violence, l’égoïsme, elle n’excluait pas pour autant le désintéressement, la hauteur de vue ou le rapport à l’Histoire. Il nous a aussi appris que l’Histoire était certes la violence, la guerre et le rapport de forces, mais que toutes les formes de civilité, de démocratie, de coopération entre les nations étaient essentielles et méritaient d’être défendues. Enfin, que toutes les théories du progrès automatique et du sens de l’Histoire étaient assez largement illusoires, mais que le fait que l’Histoire soit tragique n’interdisait pas l’espérance, la volonté, ni les progrès. Qu’on pouvait rendre la vie de chacun d’entre nous plus vivable, plus respectable et plus libre. "

De Gaulle, une vie. Vol. 1. L'homme de personne : 1890-1944

Isabelle de Gaulmyn

"J’ai aimé le premier volume de la biographie que Jean-Luc Barré a consacré au général de Gaulle. Ce tome va jusqu’en 1944, il s’attarde sur l’enfance et la jeunesse de Charles de Gaulle. L’auteur est rompu à cet exercice, on lui doit déjà des biographies de Maritain, de Mauriac, etc. Il rattache très bien de Gaulle à cette filiation de droite, catholique et monarchiste et montre ce qu’elle apporte de meilleur dans cette fidélité à une certaine idée de la France et de la nation. On peut évidemment critiquer le travail, car la plupart des archives sont issues de la famille de Gaulle, donc très influencées. Il n’en reste pas moins que c’est très bien écrit, très intéressant, et qu’on vit cette lente maturation de l’homme de Gaulle, qui rate sa carrière militaire pour une carrière politique à Londres. Il y a des pages très drôles et très savoureuses sur ses rapports avec Churchill, on aurait voulu être une petite souris pour assister à certains entretiens. Le livre fait prendre conscience de l’obstination incroyable du général, et les montagnes d’obstacles que les Anglais et les Américains ont mis sur sa route est incroyable à relire aujourd’hui. "

Transition énergétique : faut-il craindre pour l’emploi

David Djaïz

"Je vous recommande la dernière note du Conseil d’Analyse Économique. Un grand bouleversement macroéconomique s’annonce, et certains nous prédisent un nouvel âge d’or de l’emploi, avec de nouvelles «  masses paysannes », ou « masses artisanes » qui vont rénover les bâtiments … D’autres au contraire nous prédisent de la destruction d’emploi et de la décroissance. Les économistes du CAE nous montrent ici que la transition écologique ne mérite « ni cet excès d’honneur, ni cette indignité » : c’est moins de 1% de l’emploi total qui va être remis en jeu. En revanche, il y aura des réallocations nombreuses : des secteurs (artisanat) où il faudra beaucoup de travailleurs, et d’autres (industrie automobile thermique) qui vont en perdre. Certains territoires seront donc très impactés, il faut anticiper tout cela, et aujourd’hui cette anticipation fait défaut."

La guerre des mondes : le retour de la géopolitique et le choc des empires

Michel Eltchaninoff

"Je vous recommande cet ouvrage paru très récemment. Ce n’est malheureusement pas de la science-fiction, mais une analyse des nouvelles relations internationales. Bruno Tertrais est spécialiste des questions de sécurité, il décrit la montée des tensions et des guerres, entre les « néo-empires » (Chine, Russie, Iran, Turquie …) et les démocraties. L’analyse est très documentée, fouillée, et riche, mais l’auteur s’efforce aussi de répondre à des questions sur le passé et le futur. Sur le passé : pourquoi, après la guerre froide, beaucoup d’entre nous ont-ils cru que nous allions entrer dans une ère kantienne de résolution pacifiée des conflits ? Pourquoi avons-nous été aussi optimistes, en somme ? Il répond que les Etats-Unis ont cru qu’en intégrant la Russie et la Chine dans un réseau de normes communes, elles se métamorphoseraient, tandis que les Européens pensaient élargir leur expérience d’interdépendance économique. Or rien de cela n’a fonctionné. L’âge identitaire que nous vivons serait donc une réponse rageuse à la mondialisation. Une question sur le futur : les conflits d’aujourd’hui (Ukraine, Israël …) vont-ils faire système ? Y a-t-il un risque de conflit mondial ? La réponse de l’auteur est modérément pessimiste : il pense que nous aurons une très longue période de « guerre tiède », avec des affrontements ça et là, mais pas de confrontation directe entre les blocs, grâce à la dissuasion nucléaire et aux alliances occidentales, qu’il juge plus fortes que celles des « empires ». Personnellement, je ne suis pas aussi optimiste, mais l’ouvrage est passionnant. "