Jérusalem : un déjà vu sanglant / Mitterrand : l’inventaire est amer / n°193 / 16 mai 2021

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Jérusalem : un déjà-vu sanglant

Introduction

Philippe Meyer :
Après un mois de tensions, Jérusalem s'est de nouveau embrasée les 23 avril, après une manifestation du mouvement d’extrême droite Lahava, à l’entrée de la vieille ville. Les Palestiniens ont répondu à ce qu’ils ont considéré une provocation. Les forces de polices sont intervenues pour garantir « la liberté d’expression » et le « droit de manifester » de Lahava. Des cris de mort aux Arabes ont été proférés.
En dehors de ces affrontements, le cœur des griefs qu'expriment les Palestiniens et les Arabes israéliens depuis des semaines porte sur la menace d'éviction, par la justice israélienne, de plusieurs familles d’un quartier limitrophe de Jérusalem-est, Cheikh Jarrah, au profit de colons juifs.
Conquise en juin 1967 par l’armée israélienne et annexée dans la foulée, la partie orientale de Jérusalem s’est depuis lors régulièrement trouvée au cœur de flambées de violence. La part de la population arabe est passée d’un peu plus de 25 % en 1967 à près de 40 % aujourd’hui. Dans la Vieille Ville, la présence juive demeure très minoritaire, à 10%, malgré le soutien des autorités à l’entreprise de colonisation. Comme tout habitant de la ville, les Palestiniens paient des impôts à la municipalité contrôlée par Israël. Pourtant, seuls 10 % du budget municipal sont consacrés aux dépenses publiques de Jérusalem-Est. Cette différence d'investissement se répercute sur la qualité de vie des Palestiniens. Au-delà des problèmes d'infrastructures, ils sont aussi nettement plus pauvres que les autres habitants de la ville. Plus de 70 % d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté, alors que le taux de pauvreté moyen en Israël est de 21,7 %. Contrairement aux citoyens arabes établis dans les frontières d’Israël, les habitants palestiniens de Jérusalem-Est doivent pour la plupart se contenter du statut de résident et ne disposent pas du droit de vote. Des citoyens arabes israéliens, qui forment 20% de la population israélienne, ont violement manifesté à leur tour à travers le pays, notamment en Galilée.
Washington, les Nations unies, la Jordanie, gardienne des lieux saints, mais aussi des monarchies arabes, le Qatar et le nouvel allié émirati, ont fait pression sur Israël, pour qu'il tempère des opérations policières démesurées ces derniers jours. Lundi, la Cour suprême israélienne a reporté sa décision sur les expulsions dans le quartier de Cheickh Jarrah, la police a interdit aux ultranationalistes l'accès à l'esplanade des Mosquées puis à la porte de Damas, alors qu'ils y ont droit chaque année. Après une « désescalade » sensible mardi à Jérusalem, après quatre jours d'affrontements violents et des centaines de blessés, essentiellement palestiniens, depuis, une escalade militaire bien plus meurtrière a pris le relais entre les forces du Hamas à Gaza et Israël, un arabe a été victime d’un lynchage près de Tel Aviv et un Juif a été lapidé à Acre.

Kontildondit ?

David Djaïz :
C’est une situation qui inspire tristesse, consternation et désespoir. D’abord parce qu’on a l’impression d’assister à l’énième acte d’une tragédie déjà écrite. Avec cette unité de lieu : tout cela se passe dans une zone grande comme trois départements français, cette unité de temps : des montées de violences, souvent concomitantes de cérémonies religieuses, il y a eu cette intrusion sur l’esplanade des mosquées lors de la nuit du destin, un moment très important du ramadan ; et enfin l’unité d’action et de personnages, puisque les protagonistes sont toujours les mêmes, avec ce jeu de rôle entre le Hamas et le gouvernement israélien de Netanyahou, qui cherche à retrouver une assise perdue.
C’est toujours le même engrenage qui tourne, et ce sont toujours les populations civiles qui sont touchées, en particulier à Gaza où elles sont prises en étau entre les acteurs. Le Hamas tire des salves de roquettes pour montrer qu’il est le mouvement par excellence de la résistance palestinienne ; il surfe d’ailleurs sur l’incurie totale du Fatah, qui aujourd’hui est entièrement hors jeu, mais aussi sur l’absence totale de processus électoral ; il voit donc une formidable occasion de se relégitimer aux yeux de la population palestinienne. De plus, il est dopé financièrement par le Qatar et l’Iran.
De son côté, Benjamin Netanyahou, en difficulté politique du point de vue de sa coalition gouvernementale, s’appuie sur les extrémistes, les ultra-orthodoxes et toutes les franges quasi-fascistes de la knesset pour tenter de rétablir son autorité.
Rien de très nouveau, serait-on tenté de se dire. Je tempère tout de suite ce jugement en introduisant deux éléments. D’abord, il y a une différence de degrés. On voit que depuis quelques jours on a atteint une intensité que l’on avait pas connue depuis une bonne dizaine d’années. Des milliers de roquettes ont été tirées sur Israël. La quasi-totalité d’entre elles a certes été neutralisée par le système de défense anti-balistique, mais le nombre est tout de même très impressionnant. Et puis les opérations en cours de l’armée israélienne à Gaza, aériennes pour le moment, ont elles aussi atteint une intensité et une violence qu’elles n’avaient pas connues depuis longtemps.
Ensuite, l’élément réellement nouveau, ce sont les lynchages, les manifestations et les affrontements inter-ethniques à l’intérieur de la société israélienne. Ainsi, on a vu des scènes à Lod (une ville entre Tel Aviv et Jérusalem, peuplée à la fois d’arabes et de juifs) assez inédites de lynchages et d’affrontements, qui peuvent rappeler certains moments de la guerre d’Algérie. C’est la manifestation d’un dissentiment croissant dans la société israélienne, nous sommes à présent dans un vrai climat de guerre civile. On assiste également à l’émergence d’une jeune génération arabe israélienne, assez dynamique démographiquement, qui se solidarise de la cause palestinienne. C’est assez paradoxal quand on se rend compte que presque toute la communauté internationale a abandonné la cause palestinienne, à commencer par les pays arabes, dont la plupart sont très hypocrites à ce sujet. Nous parlions il y a quelques mois de la reconnaissance par certaines monarchies du Golfe de l’Etat d’Israël, on voit que les Palestiniens ont été abandonnés par presque tout le monde. En revanche à l’intérieur de la société israélienne, une conscience arabe israélienne est en train d’émerger, et elle me donne un certain espoir, en ce que cette politisation sera peut-être porteuse de solutions. Mais c’est une course de vitesse qui est engagée, car la colonisation israélienne a petit à petit grignoté depuis 1967 toutes les terres palestiniennes. L’autorité palestinienne est aujourd’hui très réduite : quelques petites poches en Cisjordanie, et la bande de Gaza, aux mains du Hamas.
La solution à deux Etats, beaucoup évoquée dans les années 2000, n’a aujourd’hui plus aucun sens. On va plutôt vers un Etat binational, mais compte tenu du rapport de forces et l’état d’esprit des protagonistes, il y a fort à craindre que ce soit un état d’apartheid durable. C’est pourquoi l’émergence d’une conscience politique à l’intérieur de la société arabe israélienne peut dessiner les termes d’une revendication politique pour un Etat de droit. Mais pour l’instant, tout cela a les allures d’un rêve, et il faudra certainement des années avant d’arriver à quoi que ce soit d’approchant.

Lucile Schmid :
Il y a effectivement une forme d’hypocrisie dans le fait de continuer à plaider pour une solution à deux Etats, car la colonisation immobilière assez systématique, menée avec l’accord implicite des gouvernements israéliens successifs, la rend géographiquement impossible.
Par rapport à la conscience politique qui émerge chez les jeunes israéliens, c’est pour le moment assez effrayant : on voit de jeunes hommes, certains juifs, d’autres arabes, qui s’affrontent, ainsi que des policiers israéliens lourdement équipés fonçant dans la foule des jeunes Palestiniens avec une détermination effrayante. On a par exemple vu des images d’une policière israélienne repoussant violemment une femme arabe voilée ; ces images, en dehors de toute forme de théorisation ou de projection géopolitique, sont assez glaçantes.
La politisation de la société est croissante, mais elle ne trouve pas de débouché dans les institutions israéliennes. On sait que ces dernières sont gouvernées par une proportionnelle intégrale, que ces deux dernières années, quatre élections législatives se sont succédées, que Netanyahou n’a pas réussi à former un gouvernement après les dernières en date, et que c’est donc son rival qui en est chargé depuis début mai. Il a 28 jours pour y arriver, mais y parviendra-t-il, alors même que ces événements radicalisent les choses ? Pour réussir à gouverner, il doit former une coalition hétéroclite, qui aurait pu aller jusqu’à un parti islamiste modéré, mais à présent on voit mal comment cela pourrait aboutir.
Dans cette tragédie dont parlait David, certains protagonistes ont intérêt à la politique du pire. Netanyahou et le Hamas par exemple. Netanyahou pour rester au pouvoir, le Hamas pour prétendre représenter la cause palestinienne, alors même qu’il n’a fait que courir après les événements. Cette politisation manque d’acteurs politiques.
Enfin, à propos de la communauté internationale, on constate que Joe Biden n’a pas remis en cause ce qu’avait décrété son prédécesseur, à savoir la reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu. Il est tout aussi clair que les Etats-Unis n’ont aucune envie de s’impliquer à nouveau en Israël. Y seront-ils contraints ? D’autre part l’Union Européenne n’a jamais eu les moyens de ses ambitions humanitaires et politiques sur ce sujet. Enfin, en signant les accords d’Abraham, un certain nombre de pays arabes ont démontré que la cause palestinienne était une cause perdue. Très clairement, il manque une implication internationale forte, car les gouvernements israéliens ont toujours regardé de très près comment la communauté internationale réagissait ; Israël n’est pas un Etat comme les autres, il a été créé délibérément par la communauté internationale, qui a une certaine responsabilité dans ses agissements. On ne peut pas laisser ces violences continuer.

Lionel Zinsou :
Je suis frappé par une impression d’instrumentalisation, de la part de pouvoirs en grande difficulté, et d’une jeunesse qui peut effectivement comporter des éléments d’espoir. Mais les élections palestiniennes, prévues pour le mois de mai, n’auront toujours pas lieu. Voilà quinze ans qu’elles sont reportées. La légitimité est donc extraordinairement faible, par conséquent j’imagine qu’à Ramallah on a tout intérêt à faire diversion. L’autorité palestinienne, n’a certes jamais été aussi faible, mais elle est tout de même souveraine. Quand vous vous promenez dans le monde, vous avez partout des ambassadeurs de la Palestine. Vous dites que les deux Etats ne sont plus possibles, mais dans les faits, ils sont bien là.
Du côté israélien, le Premier ministre n’est pas parvenu à accomplir sa première mission, constituer un gouvernement, après un quatrième échec aux législatives, où il n’a pu obtenir de majorité. Il fallait donc là aussi faire diversion de faiblesse fondamentales. Quand je vois les images, tout est provocation. Quand vous faites entrer des troupes armées dans un lieu de culte, lors de l’un des moments les plus symboliques de ce culte, dans un lieu mondialement célèbre, faisant partie du patrimoine de l’humanité, ouvert d’une certaine manière à toutes les formes d’islam, cela ne peut pas ne pas dégénérer. C’est un peu la même chose avec les milliers de roquettes tirées par le Hamas, on a vraiment l’impression qu’il faut prendre des postures, pour dissimuler des faiblesses fondamentales.
Je voudrais aussi éclairer trois points dont on parle peu. D’abord, cela ne va pas simplement être une affaire israélo-palestinienne, cela va diviser dans beaucoup de pays, non pas la communauté internationale mais les opinions publiques. En France par exemple, nous allons à l’évidence avoir à la fois un regain d’antisémitisme et une solidarité contre toutes les formes extrêmes de l’islamisme, parce que le Hamas est dans une posture de provocation, et qu’il figure officiellement sur la liste des organisations terroristes. Il va y avoir une cristallisation sur des thèmes d’antiterrorisme. On interdit les manifestations en France car elles dégénèreraient certainement. C’est l’une des particularités de la cause palestinienne : diviser les opinions publiques dans de nombreux pays.
Ensuite, sur le plan géopolitique, cette région connaît un basculement extraordinaire. Le Hamas peut faire une démonstration de puissance. Vous l’avez décrit comme surfinancé par le Qatar et l’Iran. C’est vrai, mais ces deux pays sont sur la défensive, il y a désormais une nouvelle alliance entre Israël et certaines monarchies du Golfe, c’est une situation dans laquelle l’alliance Turquie-Qatar-Iran, qui finance le pouvoir du Hamas (tandis que les services publics dans les territoires palestiniens sont financés par l’UE) est tout de même très fragile. Il est par exemple apparu que l’Arabie Saoudite est en train de conduire une opération de normalisation relative avec l’Iran, ce qui laisserait le Hamas très affaibli.
Enfin, la dimension économique n’est pas à négliger. Et dans le région, la puissance économique, c’est Israël. L’Etat hébreu possède des choses dont tous les Etats du Golfe ont besoin. En matière de technologie, sur l’économie verte par exemple. Quand vous allez à l’université du Néguev, vous vous apercevez que la maîtrise technologique des israéliens a fait de leur agriculture la plus puissante au monde en termes de rendement (en milieu aride, en plus). Israël est un fournisseur majeur d’innovations dont personne ne pourra se passer.
De l’autre côté, il est très frappant de constater que les pays du Golfe ont très longtemps été encadrés par une élite palestinienne (musulmane et chrétienne). Toutes les administrations, tous les grands fonds souverains, du Koweït aux Émirats Arabes Unis (un peu moins en Arabie Saoudite) tenaient sur cette élite. Là encore, c’est quelque chose qui est en train de s’effondrer. A la fois parce qu’il y a une montée des ressources humaines dans ces pays, mais également parce que là non plus, on ne pourra pas se passer de ce qu’Israël va apporter.
Une de mes grandes surprises en tant que financier fut de découvrir que très longtemps, la plus grande banque arabe n’était ni saoudienne ni koweitienne mais palestinienne : l’Arab Bank Plc en Jordanie. Elle ne l’est plus tout à fait aujourd’hui mais c’est révélateur. La puissance palestinienne est ailleurs qu’en Palestine ; mais même là, elle est en train de chuter.

David Djaïz :
Quand Lionel parle des ambassades palestiniennes dans le monde, je ne peux m’empêcher de penser aux tambours de la garde royale : c’est la pompe et l’apparence, mais cela dissimule à mon avis un vide d’autorité.

Lionel Zinsou :
Dans mon petit pays, le Bénin, j’avais un ambassadeur de la Palestine. Un jour, j’ai arrêté ma voiture au bord de la route, car M. Netanyahou m’appelait au téléphone. Il me dit : « vous n’allez tout de même pas voter aux Nations Unies pour quelque chose de contraire aux intérêts d’Israël sous prétexte que vous êtes sous la pression de la diplomatie palestinienne ».

David Djaïz :
Je ne le conteste pas, mais je connais plusieurs ambassadeurs palestiniens, ils appartiennent d’ailleurs à peu près tous à cette oligarchie du Fatah richement subventionnée par différentes organisations internationales aux circuits financiers discutables ; mais sur le terrain, on a une occupation directe pour à peu près la moitié du territoire et une quasi-zone de non-droit pour les Palestiniens. Ces gens vivent « en attendant Godot » toute la journée, avec des attentes interminables à des checkpoints, il est extrêmement difficile de sortir du territoire, de faire des affaires ou d’avoir des échanges normaux, la situation est proprement intenable, et génère une grande colère. Quant à Gaza, il s’agit d’une prison à ciel ouvert. C’est une petite bande de terre où l’on a la plus forte densité démographique du monde, je crois que 40% des Gazaouis ont moins de vingt ans, où le taux de chômage est très élevé et comme le rappelait Lionel, tous les services publics sont portés à bout de bras par les bailleurs et par l’Union Européenne.
Je souscris à ce qu’a dit Lionel à propos du spectaculaire renversement des alliances. Pendant longtemps, la diaspora palestinienne, grâce à l’excellence de sa formation et de son réseau, a encadré les élites du Golfe. Il y a un vrai changement depuis quelques années, qui vient aussi de ce que les pays du Golfe forment désormais leurs propres élites. Soit dans les meilleures universités occidentales, soit sur place, Mohammed Ben Salmane est une bonne illustration de cette nouvelle génération. Je ne mentionne pas ce nom de manière tout à fait anodine, car je pense que MBS est l’un des dirigeants de la région qui suit la situation avec le plus d’inquiétude, parmi ceux qui poussent le plus pour un rapprochement avec Israël. Il est à la recherche d’un nouveau modèle de développement pour l’Arabie Saoudite et comme l’a expliqué Lionel, les innovations que l’Etat hébreu est en mesure de fournir lui sont indispensables. Cette flambée de violence est donc sans doute une mauvaise nouvelle pour lui, car elle peut faire faire un pas en arrière aux acteurs de ce jeu de rôles.

Lucile Schmid :
On s’aperçoit en effet que de nombreux facteurs concourent à la situation actuelle : politiques, géopolitiques, économiques. Il faut également rappeler qu’il y a aussi de forts enjeux démocratiques. David parlait d’apartheid possible entre les deux communautés. Or l’Etat d’Israël s’est toujours défini comme une démocratie, ce qui n’était pas le cas des pays arabes voisins. Pour moi, Israël est encore une démocratie, mais on ne peut nier qu’elle est traversée par de nombreuses ambivalences. Notamment la question d’appartenir à la nation juive, par rapport à la citoyenneté, se pose très différemment que dans d’autre démocraties.
Cette question de l’asymétrie des droits est au coeur des évènements récents, car l’expulsion de certaines familles palestiniennes à Cheikh Jarrah est liée à une loi sur la récupération possible de biens par rapport à la création de l’Etat d’Israël et à la guerre des six jours de 1967. Dans ce cadre, les Palestiniens ne bénéficient pas des mêmes droits que les Juifs. Certaines ONG ont d’ailleurs déclaré qu’elles accuseraient Israël de crimes de guerre devant la cour pénale internationale si ces expulsions avaient lieu.
Qu’est-ce qu’une démocratie dans une situation aussi complexe ? Israël en est-il encore une ? S’agit-il d’une démocratie illégitime, avec Netanyahou se maintenant au pouvoir en utilisant la violence et en instrumentalisant les tensions ? Les institutions permettront-elles de refléter correctement cette société et ses nombreux tiraillements, ou va-t-on vers une coexistence non pacifique ? Je ne crois pas que le terme d’apartheid, compte tenu de son histoire, convienne à la situation, mais le fait est que des communautés vivent de plus en plus côte à côte tandis que l’extrémisme religieux contamine le débat politique. A la knesset, il y a à présent quelques suprémacistes juifs, c’est là un point de déséquilibre institutionnel essentiel.

Mitterrand : l’inventaire est amer

Introduction

Philippe Meyer :
Le 10 mai 1981, l’élection du président François Mitterrand a ouvert la voie à une série de réformes qui ont marqué le pays : économiques avec les nationalisations ; sociales avec la retraite à 60 ans, la cinquième semaine de congés payés, l'impôt sur les grandes fortunes, le relèvement du smic, des allocations familiales et du minimum vieillesse, les lois Auroux qui renforcent les droits des salariés, la semaine de 39 heures ; sociétales avec l'abolition de la peine de mort, la consolidation de l'Interruption volontaire de grossesse, la dépénalisation de l’homosexualité ; culturelles avec la création de deux nouvelles chaînes de télévision commerciale et d’une chaîne de télévision européenne, le prix unique du livre, la Fête de la Musique, les grands travaux... Au bout des deux septennats, un sondage Ipsos de janvier 1996 établissait que grâce à Mitterrand, on avait progressé sur la place de la France dans le monde, la construction européenne, les libertés, la protection sociale, la lutte contre le terrorisme, mais plutôt reculé dans la lutte contre la pauvreté, l'état de l'économie, la lutte contre le chômage ou la moralisation de la vie politique.
A l’occasion des 40 ans du 10 mai 1981, la Fondation Jean-Jaurès a mené avec l'Ifop et Génération Demain une enquête sur le regard porté aujourd'hui par les Français sur l'ancien président de la République, aussi bien sur l'homme que sur le bilan de ses deux septennats. Invités à désigner le président de la Vème République qu'ils apprécient le plus, l’ensemble des Français placent François Mitterrand au 3ème rang après le général de Gaulle et Jacques Chirac, Si l’on ne retient que l’opinion de la « génération Mitterrand », c'est-à-dire des Français âgés de plus de 55 ans qui avaient donc au moins 15 ans en mai 1981, François Mitterrand occupe la deuxième place derrière Charles de Gaulle. 58 % des Français associent à son nom le mot « socialiste » et 53 % le terme « européen ». Les classes populaires plébiscitent en priorité les réformes sociales, puis l'abolition de la peine de mort, quand les cadres mettent en avant l'abolition de la peine de mort, les congés payés et la signature du traité de Maastricht. Au Parti socialiste, la figure de Mitterrand, ne fait plus totalement consensus. Si les conquêtes sociales sont louées, le génocide rwandais et la pente libérale sur laquelle le PS est engagé depuis 1983 sont questionnés.
Quarante ans plus tard, la gauche s'avance affaiblie et désunie vers la prochaine présidentielle. L'addition de ses forces atteint tout juste les 30% : c’est le score de Marine Le Pen toute seule.

Kontildondit ?

Lucile Schmid :
Cet anniversaire du 10 mai 1981 soulève toute une série de questions. On est frappé de voir que la gauche actuelle, les héritiers de François Mitterrand, en tous cas les dirigeants du Parti Socialiste, les ont abordées en ordre dispersé. Olivier Faure n’a par exemple pas souhaité commémorer cet anniversaire, préférant se rendre à une marche pour le climat avec Jean-Luc Mélenchon, qui a lui aussi très bien connu Mitterrand. L’héritage de Mitterrand fait donc débat au sein de la gauche.
Les raisons sont multiples. La première question qui se pose est la suivante : Mitterrand était-il de gauche ? Elle est toujours d’actualité, elle a pris une acuité particulière depuis l’ouvrage de Pierre Péan, Une Jeunesse française, qui révélait comment Mitterrand avait été proche à la fois des Croix-de-Feu et par ailleurs résistant. On pense aussi à certains autres ouvrages (de Benjamin Stora par exemple) sur son rôle pendant la guerre d’Algérie alors qu’il était ministre de l’Intérieur. Et puis tout simplement ses amitiés sulfureuses, avec René Bousquet ou avec certains chefs d’entreprise, comme Roger-Patrice Pelat, qui prenaient le pas sur certains engagements personnels de valeurs.
Il y a quelque chose d’assez singulier à regarder les images de cette victoire de 1981. Lorsqu’on voit par exemple Michel Rocard sur les marches de sa mairie de Conflans-Sainte-Honorine, il a beau répéter que c’est le socialisme qui a gagné, on le sent tout de même gêné. Et quand on compare la déclaration de Rocard à celle de Mitterrand une heure plus tard, on s’aperçoit que le langage est radicalement différent. A aucun moment, Mitterrand n’évoque la gauche, il ne parle que des « forces ». De la création, de la jeunesse, du travail, etc. D’une certaine manière, il veut se placer au-dessus de la mêlée ; il s’agit davantage d’un « au-delà » que d’un « en même temps ». Il remercie les électeurs communistes, mais aussi tous ceux qui ont voté pour lui. Et comme vous l’avez rappelé, longtemps après, les Français continuent de penser que son amour de la France était assez différent de l’amour partisan.
Deuxième question : pouvait-on faire autrement ? S’agissant de 1981, on se souvient des nationalisations, des réformes sociétales importantes. Seulement il y a le tournant de la rigueur de 1983, la proportionnelle de 1986 qui donne des députés au Front National (dans le but de diviser la droite), et une victoire en 1988, avec 3% de plus qu’en 1981. Une telle longévité au pouvoir implique nécessairement de se confronter à la question des mains sales. Peut-on rester de gauche en exerçant le pouvoir ? C’est la question lancinante que se pose la gauche d’aujourd’hui. Elle est de plus dans une situation très difficile, sans leader et sans projet unificateur.
Troisième question : aurions-nous besoin d’un François Mitterrand aujourd’hui ? Connaissant les ambiguïtés du personnage, mais aussi son extraordinaire volonté de conquête du pouvoir (rappelons que pour devenir président il s’est présenté trois fois, sans se décourager), elle est, elle aussi, toujours d’actualité.

Philippe Meyer :
Pierre Desproges disait : « c’est terrible, dans la vie il faut toujours choisir ; la mer ou la montagne, fromage ou dessert, la gauche ou Mitterrand ... »

David Djaïz :
Etant né après 1981, je n’ai peut-être pas la même charge affective sur cette question que par exemple mes parents, qui étaient des militants socialistes et ont donc, comme des millions de Français, vécu cette élection comme un moment extraordinaire. Il y a évidemment des zones d’ombre, mais on ne peut nier qu’il y a une dimension symbolique et affective très forte, qui explique la résonance médiatique de cet anniversaire. Une partie de la population (presque la moitié puisqu’à l’époque on était quasiment en situation de bipartisme) accède à un pouvoir qui leur était dénié depuis les origines de la Vème République. C’est un moment important, que le sociologue Henri Mendras décrit comme « le moment de stabilisation de la Vème République ». Et ce n’était pas évident : le Parti Communiste était adepte des thèses révolutionnaires et refusait a priori le jeu institutionnel et parlementaire, François Mitterrand lui-même avait écrit Le Coup d’Etat permanent et s’était inscrit en faux contre les institutions de la Vème République, qu’il décrivait alors comme monarchiques (mais auxquelles il n’a pas touché une fois élu).
Si la charge symbolique est très compréhensible, il y a cependant une ambivalence dans cette commémoration du 10 mai 1981. Pourquoi résonne-t-elle autant, et pourquoi faudrait-il sans doute être un peu plus critique ?
S’agissant de la résonance, on peut en effet s’étonner car c’est celle d’un laps de temps assez court (de 1981 à 1983) durant lequel, avec beaucoup de dégâts d’ailleurs, on a essayé de faire une autre politique dans notre pays. Quand on examine les réformes mises en œuvre en 1981, on s’aperçoit que c’est la dernière fois qu’on tente une politique ambitieuse. Les nationalisations sont nombreuses, elles concernent de multiples secteurs, et sont faites à cause d’un diagnostic : le patronat français est trop malthusien, il n’y a pas assez de liquidités, et on se dit que la restructuration sous l’égide de la puissance publique va permettre de projeter ces groupes à l’international et de les rendre plus efficaces. Il y a dans ce domaine eu des succès et des échecs. Deuxième élément important : le retour de la planification. En 1981, Michel Rocard hérite d’un ministère de la planification et de l’aménagement du territoire, avec une volonté là encore de reprendre les fondamentaux développés par Jean Monnet à la libération.
Là où le bât a blessé d’un point de vue économique, c’est plutôt la politique de relance. Elle est intervenue dans une conjoncture internationale extrêmement dégradée, avec un Paul Volcker à la tête de la Federal Reserve menant une politique monétaire très restrictive pour casser l’inflation, avec l’arrivée de Thatcher au Royaume-Uni, avec une Allemagne qui s’engage dans une désinflation compétitive, bref des conditions très hostiles, où la relance par la consommation va surtout subventionner les industries étrangères. On se souvient de ces magnétoscopes japonais embouteillés dans le bureau de douane de Poitiers, symbolisant parfaitement cette forte erreur d’appréciation. La France s’est d’ailleurs retrouvée dès 1982 avec des déficits commerciaux et courants tout à fait sidérants. Peut-être Jean-Pierre Chevènement a-t-il raison quand il dit qu’il aurait fallu privilégier l’investissement et la montée en qualité de l’industrie française, plutôt que la relance par la consommation.
A partir de ce moment, il y a une espèce de fuite en avant dans la construction européenne, notamment avec l’acte unique de Jacques Delors qui va libéraliser les mouvements de capitaux au sein de l’UE, et petit à petit, le programme de 1981, qui ressemblait au programme de la libération, va être démantelé au profit d’une dérèglementation et d’une financiarisation de l’économie. On a gardé la jambe sociale du modèle, continuant à faire de la redistribution (pour compenser les perdants de cette nouvelle donne économique), mais on a complètement abdiqué la partie productive. Ce furent les bases d’une désindustrialisation de trente ans. Le débat économique des années 1990 et 2000 s’est au fond cristallisé sur la compétitivité, les baisses de charges, les mesures défensives, sans jamais retrouver l’imagination qu’on s’était permise entre 1981 et 1983.

Lionel Zinsou :
Je crains que François Mitterrand, écoutant David (et même un peu Lucile) ne se retourne dans sa tombe. L’idée qu’on peut lui opposer la désinflation compétitive, la réduction des ambitions de la politique de l’offre, et que cela constitue la trace qu’il laissera doit être une sacrée déception après une vie de grands combats, de destruction du Parti Communiste ... On peut reconnaître qu’il fut certainement un peu faible sur la désinflation compétitive, mais Mitterrand ne se limite tout de même pas à cela.
Ce qui me frappe au contraire, c’est la dimension symbolique et mythique ; c’est le Panthéon, c’est la rose sur la tombe de Jaurès ... Il me semble qu’elle échappe singulièrement à Olivier Faure, par exemple. Mitterrand commence par cette manifestation gigantesque, où il est seul devant. Cela résume d’ailleurs assez bien le personnage : il faisait très attention à être tout seul devant. MM. Fillioud et Lang, tout transportés de joie qu’ils sont, se trouvent tout de même assez loin derrière. L’éloge à Pierre Bérégovoy « livré aux chiens », on peut garder de Mitterrand des formules extraordinaires.
Personnellement, j’ai eu la chance, au titre de l’association des amis de l’Institut François Mitterrand, d’aller à Latche, il y a deux ans. Et il ne s’agit pas simplement d’une maison en forêt ; Latche a la même puissance (mais en bien plus réussi) que le hameau de Marie-Antoinette à Versailles, c’est toute une série de symboles. C’est bien plus aristocratique que rustique, mais tout est travaillé, tout est signe.
Mitterrand était un grand styliste. Il écrivait des choses extraordinaires. Quelqu’un qui quitte ses fonctions en parlant des forces de l’esprit, affirmant qu’il sera toujours là, cela a tout de même une tout autre allure qu’un simple « au revoir » (pourtant déjà très réussi). Et il est manifestement toujours là dans notre imaginaire. Toutes les réformes sociétales sont autant de volontés de jouer un rôle historique. Mitterrand était un grand écrivain ; c’était l’homme des promenades, des paysages. Il est arrivé qu’il appelle ses conseillers et leur annonce qu’ils allaient effectuer une tâche très importante : suivre en hélicoptère les lignes de partage des eaux. Un autre jour, il s’agissait se suivre les limites nord de la culture de l’olivier ... Cela suppose un détachement par rapport à des contingences politiques qui serait impensable aujourd’hui.

Philippe Meyer :
Mais Pompidou avait aussi cela. Il y a cette célèbre lettre sur les platanes qu’on abat au bord des routes, on pourrait aussi citer sa réponse à la question qu’on lui fait à propos du suicide de Gabrielle Russier ; après une courte hésitation, il répond par quelques vers d’Eluard. Il me semble que Pompidou parvenait à s’intéresser à la fois à tout cela et à la désinflation compétitive.

Lionel Zinsou :
L’un n’empêche évidemment pas l’autre, mais les gestes sont très importants. D’une certaine manière, il est beaucoup plus important de prendre la main du chancelier Kohl à Verdun que d’entrer dans des détails de la coopération franco-allemande. Mitterrand était un homme de mythes.
Il y a enfin la saga personnelle ; le moment où l’on sent que plus rien sur cette terre n’a de véritable importance et qu’il est donc temps de présenter Mazarine aux yeux des Français, et d’assumer une vie qui a été double. On pourrait aussi parler des grands travaux : tous ses successeurs ont regretté de ne pas avoir couvert la France de monuments, ce qui lui avait manifestement longuement préparé. Quarante ans après, tout cela me paraît plus important, et c’est à mon avis ce que devraient se demander les futurs candidats à la présidence : « quel est mon pouvoir de faire de la légende ? »

Lucile Schmid :
La question de l’incarnation de la profondeur historique est effectivement essentielle à la fonction présidentielle, mais cette profondeur s’acquiert par le goût du secret. Dès lors, elle se pose très différemment aujourd’hui, où le moindre froncement de sourcil est scruté par les médias et disséqué sur les réseaux sociaux. Au fond, l’une des forces de Mitterrand est qu’il nous avait convaincu qu’il était dans cette profondeur, et que nous ne savions pas tout de lui.
Cette question se pose pour la gauche d’aujourd’hui, qui joue beaucoup sur l’éthique et la transparence, alors même que l’exercice du pouvoir suppose de se confronter aux compromis, aux ambivalences, aux zones d’ombre.
A David, qui est d’une autre génération, je recommande un roman de Serge Joncour, Nature humaine, qui raconte l’accession au pouvoir de François Mitterrand. On est frappé de voir comme il passionne les jeunes. La question du romanesque en politique, présente autrefois et évacuée aujourd’hui, intéresse énormément la jeunesse.

David Djaïz :
Je voudrais rassurer Lionel en l’assurant que je suis également très sensible aux aspects légendaires et stylistiques de Mitterrand. Je crois d’ailleurs que c’est ce talent qui le met dans le panthéon des meilleurs présidents aux yeux des Français. Cet art de la mise en scène et du secret, et ce côté un peu magicien. Chevènement raconte d’ailleurs une anecdote amusante ; lorsque Mitterrand s’était exprimé pour clôturer les assises de la recherche, il avait parlé d’astrologie au lieu d’astronomie ... Effet garanti dans la salle.
Les années Mitterrand sont ambivalentes, en ce qu’il y a une vraie tentative d’une autre politique, rattrapée par la réalité du monde. Les socialistes avaient conçu un programme pour un seul pays, incapables de voir que le monde avait changé. J’espère que tous ceux qui se réclament de Mitterrand aujourd’hui seront capables de dépasser cette erreur, de proposer une politique de transformation sociale qui n’ignore pas le monde tel qu’il est.

Philippe Meyer :
Pour ma part, je ne fais pas partie de l’association des amis de François Mitterrand. A propos du mythe dont nous parlions, je suis frappé par la capacité d’un certain nombre de gens à en fabriquer de toutes pièces. Ainsi, la fameuse « libération des ondes » et la distance prise entre le pouvoir et les radios d’Etat. Il se trouve que je travaillais pour une radio nationale à cette époque, et j’ai vu arriver des journalistes qui étaient là parce qu’ils avaient une carte politique, soit d’un syndicat, soit du PS, pour demander -et obtenir- des promotions. Elles se sont d’ailleurs souvent traduites à l’antenne par des catastrophes telles qu’il a fallu prier ces gens de continuer à toucher leur salaire mais sans rien faire.
Quant à la télévision, il faut tout de même se souvenir des conditions dans lesquelles ont été créées la Cinq et la Six. En matière de conception de la télévision, l’arrivée de M. Berlusconi aurait dû dessiller quelques yeux. Il semble qu’en dépit de tout cela, le mythe se porte bien.

Les brèves

Nœuds de vie

David Djaïz

"Nous parlions de la vigne et de l’olivier, de la ligne de partage des eaux, des thèmes gracquiens. Je vous recommande la lecture de ces carnets inédits de Julien Gracq. Comme François Mitterrand, Julien Gracq était un grand promeneur. Géographe de formation, il est très attentif à la beauté des paysages, et notamment des bords de Loire qu’il connaissait bien. Il y a notamment un passage magnifique. Il est à sa fenêtre à Saint-Florent-le-Vieil, il voit le paysage depuis sa chambre et s’exclame : « l’homme a tellement refaçonné la planète à son image qu’il n’a plus rien à admirer. Que va-t-il faire le jour de sabbat ? » Ce propos écrit dans les années 1970 fait vraiment écho à l’anthropocène d’aujourd’hui, cette idée que l’Histoire et la Nature sont entrées en collision. "

Le piège africain de Macron

Lionel Zinsou

"Je recommande la lecture de cet essai d’Antoine Glaser, ce journaliste spécialisé sur les questions africaines. Il s’agit non seulement d’une analyse mais aussi d’une longue interview du président Macron à propos de l’Afrique. comme ce sont des sujets assez sensibles, je pense qu’il est intéressant de s’y pencher. D’autant qu’il y a souvent un regard un peu paradoxal chez l’auteur ; l’une de ses thèses est qu’on a beaucoup parlé de la Françafrique, mais qu’aujourd’hui, c’est plutôt « l’Africafrance » qui est aux affaires. Il y a eu un renversement de la question « qui domine qui ? ». Les pays africains sont en réalité en train de s’imposer à la France et se donner des choix avec des puissances concurrentes. Il y a également une tentative de renverser la table de la part de Macron, avec l’idée forte qu’on a un regard plus légitime quand on n’était pas né au moment de la décolonisation. "

La Revue des deux mondes

Lucile Schmid

"J’ai envie de consacrer cette brève à Romain Gary, un auteur que j’aime beaucoup. Il se trouve que la revue des deux mondes lui consacre un dossier passionnant ce mois-ci. On y trouve notamment un texte de Myriam Anissimov, qui a écrit une superbe biographie de l’auteur. Il y a aussi dans ce numéro un article intitulé « La France est-elle un pays communiste ? » dont je tiens à dire que je ne partage pas totalement l’orientation. A propos de Romain Gary, et en écho à notre conversation sur François Mitterrand, je vous recommande un autre ouvrage paru en 2014, Le Sens de ma vie, qui est le dernier entretien accordé quelques semaines avant son suicide. On peut notamment y lire : « Je crois surtout que c’est la vie qui nous a, qui nous possède, c’est l’Histoire qui m’a en quelque sorte embobiné ». "

L’emprise du faux

Philippe Meyer

"Ce livre est signé du président de l‘agence France Presse, Fabrice Fries. Le sous-titre est Désinformation : le temps du combat, et il est parfaitement justifié par le contenu de l’ouvrage. Celui-ci recense ce qu’il y a d’ancien et ce qu’il y a de nouveau dans la désinformation, et analyse le pic qu’a constitué l’invasion du Capitole aux Etats-Unis. Il propose également un certain nombre d’actions et de réformes sur tous les maillons de la chaîne de la désinformation. "