Que signifient les mouvements sociaux? (#38)

Que signifient les mouvements sociaux?

Introduction

A l’orée de la deuxième année du quinquennat, le pays connait de nombreux mouvements sociaux en réaction aux différents projets de réforme. Depuis le 3 avril, le mouvement des cheminots s’oppose à la réforme de la SNCF tandis que, pour protester contre la loi ORE et la réforme du baccalauréat jugée élitiste, plusieurs universités sont occupées et que les fonctionnaires dénoncent ce qu’ils considèrent comme la casse de leur statut. Ils s’opposent au gel du point d’indice, à la réintroduction du jour de carence ou à la suppression annoncée de 120 000 postes d’ici à 2022. Selon eux, le manque de moyens, le manque de temps et l’épuisement global des effectifs entraîneraient une dégradation générale des conditions de travail et une baisse de qualité des services. La grogne a atteint les lycéens confrontés aux dysfonctionnements de la plateforme ParcoursSup’ qui aurait laissé plus de la moitié des élèves sans affectation pour l’année prochaine. Au début de l’année, dans une tribune publiée par Libération, un collectif de mille médecins et cadres de santé s’est alarmé de la nouvelle cure de rigueur du budget de la santé et dénonce la baisse de la qualité des soins et la démotivation des soignants. Mais le mécontentement ne se limite pas au secteur public : à Air France ou à Carrefour, nombre de salariés ont décidé de faire grève et demandent une hausse des salaires, de meilleures conditions de travail ou la certitude de garder leur emploi. Ces mobilisations, comme celle du 1 er mai, ont quelquefois enregistré un niveau inédit de violences perpétrées notamment par les « Black Block » d’ultra-gauche. A ces préoccupations s’est ajoutée en mars une forte mobilisation contre la loi Asile et Immigration de Gérard Colomb jugée inhumaine dans son traitement de l’immigration irrégulière et dénoncée à l’intérieur même de la majorité. Mais, si les syndicats sont unis pour la première fois depuis 2010, le nombre de manifestants a diminué des deux tiers entre le 22 mars et le 22 mai. Même à la SNCF, où 95% des cheminots se sont prononcés contre la réforme lors d’un « vot’action », la mobilisation semble faiblir. Un TGV sur deux circule désormais contre un sur cinq au plus fort de la grève.

Les brèves

Le Monde vu d'Asie au fil des cartes

Philippe Meyer

"Actuellement au musée Guimet : une exposition qui s’appelle le « Monde vu d’Asie ». C’est une exposition qui montre comment les cartes géographiques les japonaises, les chinoises, les indiennes ou les coréennes, se sont représentées le monde au fil des siècles. Sur le plan de l’esthétique ce sont des cartes absolument magnifiques et sur le plan de l’analyse géographique ou géopolitique, il y a là de quoi méditer et de quoi se renseigner. Et donc j’invite vivement ceux de nos auditeurs qui sont parisiens, banlieusards ou qui viendraient à venir à Paris à aller voir cette exposition « le Monde vu d’Asie au fil des cartes »."

Les carnets du Paysage

Marc-Olivier Padis

"Alors je voudrais vous recommander une revue qui s’appelle les Carnets du Paysage, publiée par Acte Sud en commun avec l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage. C’est une revue dirigée par deux philosophes qui sont Jean-Marc Besse et Pierre Donadieu qui sont deux spécialistes des questions de géographie et du paysage. Ce numéro est consacré à la question du « commun », c’est à dire à la gestion collective des biens communs, des ressources communes et précisément, c’est souvent à propos des ressources naturelles que la question des communs a été posée et développée par conséquent, le paysage est concerné de multiples manières par ce sujet. On trouvera dans ce beau numéro qui est richement illustré, une très belle présentation des articles du paysagiste Gilles Clément, de la philosophe Catherine Larrère et de beaucoup d’autres donc je rappelle les Carnets du Paysage chez Actes Sud"

La mort de Staline

Jean-Louis Bourlanges

"Si vous détestez le Stalinisme vous avez bien sûr la vieille option qui consiste à lire L’opium des intellectuels de Raymond Aron mais je dois dire qu’il faut aller voir la Mort de Staline. C’est un produit absolument exceptionnel parce que c’est une vision assez claire des intrigues abominables qui ont entouré la mort de Staline notamment le complot de Beria qui se termine par sa revolvérisassion par ses petits camarades donc c’est assez sérieux. Mais en même temps c’est quelque chose d’autre. C’est un film d’un réalisateur britannique qui porte un nom italien Armando Iannucci sur la base d’une bande dessinée de Thierry Robin et Fabien Nury qui est assez remarquable et pourtant ça n’est pas réel, ces gens parlent anglais, ces gens ne prétendent pas du tout ressembler au modèle malgré le fait qu’on les voit tous : Khrouchtchev, Beria et les autres. Mais c’est surréaliste, c’est à dire que c’est plus réel que le réalisme. C’est une espèce de description hilarante à la Monty Python etc. mais hilarante de toutes les pathologies d’un régime absolument abominable et où on voit que la dénonciation de l’horreur par la dérision c’est souvent beaucoup plus efficace que par l’indignation."

Chris Marker à la cinémathèque et dans la revue Esprit

Lucile Schmid

"Moi je voulais recommander d’aller à la cinémathèque française pour aller voir l’exposition sur Chris Marker qui porte le nom de « Les 7 vies de Chris Marker » et il se trouve qu’en même temps, la revue Esprit publie un numéro qui s’appelle « Les engagements de Chris Marker ». Vous savez Chris Marker c’est un artiste voyageur polymorphe et il y a notamment dans ce numéro de la revue Esprit un article qui s’appelle « Croix de bois et chemin de fer ». C’est un article qui raconte un voyage de Chris Marker en Allemagne en train dans les années 50 où il se confronte à des allemands et notamment il y a une citation absolument extraordinaire où quelqu’un lui dit : « Je suis arrivé à Paris en juillet 1944, pas de chance nous avons été obligés de repartir tout de suite » et je trouve que par rapport à ce qu’a dit Jean-Louis Bourlanges sur la dérision ça résume toute la pensée de Chris Marker"

Hommage à Philip Roth

François Bujon de L’Estang

"Personnellement je voulais saluer la mémoire de Philip Roth qui nous a quittés cette semaine à l’âge de 85 ans et il faut vraiment être un scandinave semi-assoupi du jury du prix Nobel pour ne pas constater que Roth est un des plus grands écrivains du XXe siècle. Il est vrai qu’ils ont déjà raté Joyce, Proust et Nabokov qu’ils n’ont pas davantage couronné. Tout ça pour dire que c’est l’un des plus grands auteurs américains de la deuxième moitié du XXe siècle. C’est un homme qui au-delà des explorations psychanalytiques s’est beaucoup interrogé sur la nature humaine et ses dernières œuvres sur la maladie, le vieillissement, la mort sont absolument bouleversantes dans l’ensemble et que ses grands romans comme American Pastoral décrivent les névroses ou les maladies de la société américaine du siècle dernier avec une acuité et avec un talent qui en font un vrai géant de la littérature "