Politique intérieure et extérieure de Trump / n°390 / 16 février 2025

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POLITIQUE INTÉRIEURE DE TRUMP

Introduction

ISSN 2608-984X

Philippe Meyer :
Depuis son investiture, il y a quatre semaines, Donald Trump a lancé par décrets une série de politiques avec pour objectifs en politique intérieure de réduire l'État fédéral, de freiner l'immigration et de mettre fin au « wokisme ». Au nom de la lutte contre la dette fédérale qui s’élève à 36.000 milliards de dollars, le patron de Tesla et du réseau X, Elon Musk et une poignée d’ingénieurs, réunis au sein du nouveau département de l’efficacité gouvernementale (DOGE), crée par décret présidentiel, organisent des coupes claires dans l’État fédéral. Une purge qui a lieu sans audit ni implication du Congrès et provoque la désorganisation de l’administration. L’agence de développement USAid est démantelée et le ministère de l’éduction devrait suivre le même sort. Les syndicats et les organisations de gauche contestent en justice la mise en place d’un plan de départs volontaires – dit « congé administratif », avec salaire assuré jusqu’en octobre – offert à deux millions d’employés du secteur public. Pour l’heure, selon la Maison Blanche, 75.000 fonctionnaires fédéraux ont accepté l'offre de départ volontaire soit 3% du total des effectifs. Elon Musk visait 5 à 10%. Tandis que l’ultimatum donné aux fonctionnaires a été repoussé par un juge fédéral, Elon Musk s’est vu interdire l’accès aux données du Trésor. Mais à ce stade, personne ne peut imaginer à quoi ressemblera l’État fédéral dans six mois.
Avec l’immigration, les marqueurs identitaires ont été également au cœur des décrets présidentiels. Une cible prioritaire a été désignée : les programmes DEI (diversité, équité, intégration) ont été fermés, les employés placés en congé administratif, tandis que certains grands groupes privés sabordent leurs propres initiatives. Le dernier marqueur identitaire essentiel est la remise en cause du droit du sol, pour les enfants de migrants illégaux. Il s’agit selon les juristes d’une atteinte évidente au 14ème amendement de la Constitution. Trois juges fédéraux ont déjà suspendu l’application du décret présidentiel.
Alors que Joe Biden a laissé un déficit public de 6,3% du produit intérieur brut, le programme de Donald Trump comporte des mesures très coûteuses qui accentuent les pressions inflationnistes. D’abord les baisses d’impôts, notamment sur les sociétés, dont le taux devrait passer de 21% à 15%. Ensuite la multiplication des droits de douane dont Donald Trump rêve qu’ils financent à eux seuls le Trésor. Une politique qualifiée par le Wall Street Journal de « guerre commerciale la plus stupide de l’histoire » qui menace de faire exploser de vastes pans de l’économie, d’éliminer des milliers d’emplois et de mettre en péril la sécurité des États-Unis. Enfin, la perte de la main-d’œuvre bon marché qui fait tourner l’économie des États-Unis contribuera à alimenter l’inflation, le milliardaire ayant promis d’expulser « en masse » des migrants.

Kontildondit ?

Lucile Schmid :
Je voudrais commencer par deux citations. La première est de Donald Trump, qui déclarait début février : « En 17 jours, nous avons accompli plus que d’autres en huit ans. » La seconde vient de Joe Biden, dans son discours d’adieu : « Une oligarchie prend le pouvoir aux États-Unis. » Ces deux phrases illustrent bien la difficulté à qualifier la situation actuelle aux États-Unis. Au-delà du flot incessant de discours, Trump met aussi en scène son action. Souvenez-vous du 20 janvier, jour de son investiture, lorsqu’il s’est affiché en train de signer 50 executive orders, du plus anecdotique au plus fondamental. Certes, tous les présidents américains signent des décrets à leur arrivée, mais ici, il s’agissait d’une démonstration de force. Cette mise en scène, cette surenchère d’images qui marquent les esprits. On se rappelle aussi son déplacement à Los Angeles, ravagée par des incendies incontrôlables. Plutôt que d’apporter une réponse à la catastrophe humanitaire et environnementale, il a menacé les autorités locales : « Vous n’aurez pas d’aide si vous ne changez pas votre politique. » Tout est spectacle, mais derrière cette communication outrancière, il n’y a pas que des discours, mais aussi des actes. Comme l’a souligné Philippe, le démantèlement des institutions est bien réel. Ce projet n’est pas seulement idéologique ou destructeur, c’est une refonte radicale de l’État fédéral et un nouveau modèle de société.
Ce n’est pas seulement une croisade contre le wokisme, c’est un rejet de toute forme de diversité. On le voit avec la suppression des programmes d’équité et d’inclusion à l’échelle nationale, qui s’inscrit dans la même logique que la dissolution de l’USAID. Il y a une cohérence idéologique indéniable. Trump va encore plus loin en annonçant une grâce collective pour les émeutiers du Capitole (plus de 14.000 personnes). Ce qui frappe, c’est que la brutalité qui a toujours caractérisé Trump envers les individus s’étend désormais aux institutions elles-mêmes.
Dans un pays bâti sur l’équilibre des pouvoirs, on assiste à un affaiblissement inédit des contre-pouvoirs. Depuis le début du XIXe siècle et l’arrêt Madison, l’idée que la démocratie américaine repose sur des checks and balances semblait acquise. Or, aujourd’hui, ces garde-fous paraissent menacés. Le démantèlement d’une agence fédérale comme l’USAID devrait relever du Congrès, et pourtant, celui-ci semble impuissant. Les Démocrates, divisés, hésitent entre attendre que Trump échoue ou entrer dans une opposition frontale. Les républicains, eux, lui sont quasiment totalement soumis. Les véritables contre-pouvoirs sont désormais du côté des juges : depuis le 20 janvier, plus de 50 recours ont été déposés au niveau fédéral. Certaines décisions suspendent temporairement des mesures phares – l’expulsion des fonctionnaires, l’intrusion dans les bases de données du Trésor – mais ces suspensions sont toujours limitées dans le temps. Autrement dit, elles ne sont au mieux que des sursis. Pendant ce temps, la machine Trump-Musk avance inexorablement. Ce qui me frappe, c’est qu’on a l’impression que les institutions sont comme des portes dont les serrures étaient déjà forcées. L’assaut du Capitole n’était que le prélude à un assaut plus fondamental contre l’État lui-même.
Quels scénarios sont possibles ? D’un côté, un sursaut des institutions : des élus, Démocrates et Républicains, qui résistent, des juges qui durcissent leur position. Mais peut-on vraiment y croire, quand la Cour suprême est acquise à Donald Trump ? L’autre scénario est celui du pire : une dérive vers la plutocratie et le démantèlement progressif de l’État fédéral. Cette perspective nous oblige à replonger dans l’histoire américaine. Le nouveau modèle de Trump s’inspire de William McKinley, ce président de la fin du XIXe siècle qui avait fondé sa politique sur le protectionnisme et les droits de douane, à une époque où l’État fédéral était encore embryonnaire. Sommes-nous en train d’assister à un retour vers cette forme d’anarchie, où l’État fédéral s’efface ? Une chose est sûre : quand l’État de droit est bafoué par ceux qui devraient le garantir, il est très difficile de restaurer son autorité.

François Bujon de l’Estang :
Si vous avez aimé « Trump 1 », vous allez adorer « Trump 2 ». Parce que l’homme s’est radicalisé. En 2016, il avait été le premier surpris par sa victoire. Il était arrivé sans expérience politique, sans véritable connaissance des institutions ni des rouages du pouvoir. Il a appris sur le tas, en multipliant les tâtonnements et en gouvernant avec une administration souvent dysfonctionnelle. Il a changé plusieurs fois de conseillers à la sécurité nationale, a eu quatre secrétaires d’État … Il naviguait à vue. Cette fois, c’est un tout autre Donald Trump. Il a gouverné pendant quatre ans, puis a passé quatre ans dans l’opposition, affrontant la justice fédérale et plusieurs juridictions d’État. Il a énormément mûri politiquement. Il connaît parfaitement la mécanique du pouvoir et sait exactement comment en user. Ses équipes sont désormais prêtes. Dès la période de transition, avant même d’avoir prêté serment, il a procédé à des nominations en rafale. Et le critère de sélection n’a pas été la compétence, mais la loyauté absolue envers lui. Il a organisé son gouvernement comme un despote, s’entourant d’hommes dévoués. Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de nominations pertinentes – son secrétaire au Trésor et son secrétaire d’État sont par exemple compétents et ont déjà exercé des responsabilités gouvernementales. Mais d’autres, en revanche, sont des choix pour le moins contestables.
L’autre élément clef, c’est qu’il a mis la main sur tous les leviers du pouvoir. Le parti républicain, d’abord, est totalement sous son contrôle. Pendant le mandat Biden, bien peu d’élus Républicains ont osé s’opposer à lui. Les rares à l’avoir fait, comme Liz Cheney, ont été écartés sans ménagement. Il dispose aujourd’hui d’un parti qui lui obéit au doigt et à l’œil. Il a par ailleurs verrouillé l’appareil judiciaire. Lors de son premier mandat, il a nommé trois juges à la Cour suprême, ce qui lui donne désormais une majorité de six voix contre trois. Il détient aussi la majorité au Congrès, même si elle reste fragile : au Sénat, il n’a que 53 sièges contre 47, et à la Chambre des représentants, seulement cinq voix d’avance.
Mais la nouveauté la plus frappante, c’est qu’il a désormais le grand capital derrière lui. Wall Street l’a toujours soutenu, car sa politique plaît aux marchés, mais cette fois, c’est tout le secteur technologique qui s’est rallié à lui. Dès son investiture, après les premières annonces d’Elon Musk, la Silicon Valley s’est alignée en bloc. Jeff Bezos, Mark Zuckerberg, Curtis Yarvin, Larry Ellison… Tous chantent les louanges de Trump et lui servent de relais ; c’est inédit. Enfin, il faut noter sa méthode de gouvernance. Dès la période de transition, il a démarré à pleine vitesse, ce qui est extrêmement rare. Il utilise toujours la même stratégie : d’un côté, l’effet de sidération, en frappant un grand coup dès qu’il le peut, pour déstabiliser ses adversaires. De l’autre, l’effet de saturation, en étant omniprésent, sur tous les médias, à toute heure. Il continue de tweeter la nuit, si bien que chaque matin, Washington se réveille en se demandant ce qu’il a encore inventé.

Michaela Wiegel :
J’aimerais aborder ce sujet sous un autre angle, en partant de la victoire électorale de Trump pour m’interroger sur ses chances de succès. Comme l’a rappelé François, son premier mandat était marqué par l’improvisation et l’apprentissage du pouvoir. Cette fois-ci, la donne est différente : Trump a remporté le vote populaire, notamment grâce à un soutien accru des minorités, en particulier les Latino-Américains et une part significative des électeurs noirs. Il a su créer une attente forte, et c’est un aspect qu’on ne peut ignorer lorsqu’on parle de lui. D’Europe, cette assise populaire peut sembler déroutante, mais elle est bien réelle.
L’un de ses engagements majeurs concerne le pouvoir d’achat, une thématique familière des campagnes électorales en Europe. Pourtant, malgré les promesses, les résultats économiques ne suivent pas. De la gauche. La droite, de Thomas Piketty, qui évoque un national-capitalisme, à Henry Sullivan, qui parle d’une politique inflationniste, tous les économistes, quelle que soit leur orientation, constatent que les premières mesures prises par Trump ont eu un effet immédiat sur les prix. En 25 jours seulement, on observe déjà une flambée de l’inflation. Ce phénomène peut sembler abstrait, mais il se traduit concrètement : une douzaine d’œufs coûte désormais 8 dollars. L’imposition de droits de douane très élevés sur les importations, couplée aux pressions exercées sur la Réserve fédérale pour baisser les taux d’intérêt, constitue une combinaison explosive. Si cette politique se poursuit, elle risque d’aggraver encore la situation. Pour l’instant, il est clair que Trump n’a pas su maîtriser l’inflation et que les attentes économiques de ses électeurs risquent d’être rapidement déçues.
Lucile l’a évoqué : Trump s’est aussi placé entre les mains d’une oligarchie. Prenons l’exemple de Peter Thiel. Ce milliardaire de la tech, né en Allemagne en 1967, a grandi entre la Californie et la Namibie avant de revenir aux États-Unis, où il est devenu l’un des hommes les plus influents de la Silicon Valley. Il a joué un rôle clé dans l’émergence de figures comme J.D. Vance, auteur de Hillbilly Elegy (qui dénonçait à l’origine la déchéance de la classe ouvrière blanche), avant de devenir sénateur de l’Ohio, puis vice-président grâce au soutien financier de Thiel. Aujourd’hui, il est l’une des têtes pensantes du trumpisme. Peter Thiel est un admirateur de Carl Schmitt, le juriste allemand qui, pendant la République de Weimar, a théorisé l’effondrement de la démocratie libérale et la supériorité des régimes autoritaires. L’influence de cette pensée est palpable dans la gouvernance actuelle des États-Unis. C’est ici que l’idée de national-capitalisme prend tout son sens. Nous assistons à un bouleversement idéologique majeur : les États-Unis, qui ont historiquement été les propagateurs du libéralisme économique, se retirent progressivement de la scène mondiale et commencent à diffuser un modèle de national-capitalisme qui rompt avec leurs traditions. Ce tournant marque un changement profond dans l’ordre international.

Jean-Louis Bourlanges :
Nous assistons en effet à une transformation radicale des États-Unis qui, selon une expression désormais courante, sont en train de devenir un rogue state, un État voyou. C’est une révolution intérieure et internationale de première ampleur. Qu’est-ce qui caractérise le trumpisme ? Fondamentalement, une idée qui a toujours été celle des régimes autoritaires : unir les gens non pas par ce qu’il y a de meilleur en eux, mais par ce qu’il y a de pire. Tacite disait de Narcisse et de Néron qu’ils étaient liés par une « communauté de vice ». Trump fédère une coalition du ressentiment, y compris dans les catégories les plus marginalisées, dont il flatte les instincts les plus sombres.
Je répugne habituellement à employer le mot « fascisme », tant il a été galvaudé, mais il y a dans le trumpisme des éléments qui en rappellent la structure. D’abord, un nationalisme identitaire exacerbé, qui s’exprime sur deux plans : à l’international, par un mépris absolu des autres nations ; à l’intérieur, par une volonté d’éliminer le corps étranger – en l’occurrence, les immigrés, chassés par millions. L’analogie historique est troublante. Dans l’Allemagne nazie, l’ennemi intérieur était le Juif ; ici, c’est l’immigré. Ensuite, la remise en cause systématique des institutions. Tout y passe : les juges, la police, le Congrès, les États fédérés… Chaque contre-pouvoir est raboté, contourné ou instrumentalisé. Il y a une subversion méthodique de l’État de droit. Ce qui est frappant, c’est aussi l’inversion des valeurs démocratiques. Le vice-président Vance expliquait récemment que les Européens ne sont pas de vrais démocrates parce qu’ils empêchent l’extrême-droite d’accéder au pouvoir … Ce renversement des principes est une constante du trumpisme. Troisième élément structurant : l’utilisation autoritaire de la technologie. Elle devient l’instrument des puissants pour imposer leur domination, notamment par le contrôle de l’information – ou plutôt de la désinformation. L’objectif est clair : saturer l’espace public, créer une confusion permanente et imposer une vision du monde où l’adversaire politique n’est plus un rival, mais un ennemi à abattre.
Sur ce point, la référence à Carl Schmitt est tout à fait pertinente. Sa théorie politique repose sur un principe simple : la politique, ce n’est pas le triomphe des idées, mais celui de l’ami sur l’ennemi. Le trumpisme fonctionne exactement ainsi : il ne s’agit pas de gouverner pour tous, mais de fédérer un camp pour parvenir à en éliminer un autre. Mais ce qui me frappe le plus, c’est l’emprise idéologique qu’exerce cette pensée. J’emploie hégémonique au sens gramscien du terme : Trump ne se contente pas d’exercer une domination politique, il impose un nouveau cadre intellectuel. Il a retourné des secteurs entiers qui, il y a encore quelques années, se présentaient comme progressistes et libertaires. Un exemple édifiant : Jeff Bezos, propriétaire du Washington Post, a empêché son journal de soutenir le candidat démocrate.
Cette idéologie ne se limite pas aux États-Unis. Elle s’inscrit dans une dynamique mondiale. On observe aujourd’hui une convergence troublante entre les trois grandes puissances illibérales du moment : la Russie de Poutine, la Chine de Xi Jinping et l’Amérique de Trump. Ces régimes partagent une même vision du pouvoir : une alliance entre autoritarisme politique et domination économique. Le modèle chinois est un capitalisme d’État dirigé par des milliardaires sous contrôle du Parti communiste. Le système de Poutine est une kleptocratie où le pouvoir et l’argent ne font qu’un. Trump, lui, est en train de transformer les États-Unis en une oligarchie financière qui s’empare de l’État.
C’est un basculement historique majeur. Pendant des décennies, les États-Unis ont été les propagateurs du libéralisme politique et économique. Aujourd’hui, ils deviennent l’un des moteurs d’un national-capitalisme autoritaire, où la démocratie n’est plus qu’un vernis au service des puissants. Ce que nous voyons émerger, c’est un monde où le pouvoir appartient aux milliardaires et où les principes démocratiques sont devenus, aux yeux de ces nouveaux maîtres, des archaïsmes à balayer. Nous entrons dans une ère où les canons de la beauté sont changés en canons de l’horreur.

POLITIQUE EXTÉRIEURE DE TRUMP

Introduction

Philippe Meyer :
Dès son retour à la Maison Blanche, le 20 janvier, Donald Trump a signé un décret exécutif visant à retirer les États-Unis de l’Organisation mondiale de la santé, puis de l’accord de Paris sur le climat. Washington a aussi imposé des sanctions contre les magistrats de la Cour pénale internationale, révisé son engagement au sein de l’Unesco et décidé l’arrêt de sa contribution à l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), qui était déjà gelée. Simple pays observateur, les États-Unis n’assisteront plus aux travaux du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme. En moins de trois semaines, Donald Trump a esquissé une feuille de route sidérante : s'emparer du Groenland et du canal de Panama ; faire du Canada le 51ème État américain, et prendre possession de la bande de Gaza pour la transformer en « Côte d'Azur » du Moyen-Orient.
Après avoir imposé des droits de douane de 10% supplémentaires sur les produits chinois, puis de 25% sur l’aluminium et l’acier, le président américain a franchi une étape supplémentaire jeudi en annonçant la mise en place de « droits de douane réciproques » sur toutes les marchandises importées. En décidant de s’affranchir des règles de l’OMC, Donald Trump déclare une guerre commerciale au reste du monde.
Mercredi, pour la première fois depuis février 2022, un président américain en fonction a eu un appel téléphonique direct avec Vladimir Poutine. Trump a annoncé qu’il pourrait rencontrer son homologue russe en Arabie saoudite, à une date inconnue. Sur l’Ukraine, la négociation s’annonce entre Moscou et Washington sans l’Ukraine ni les Européens. Le même jour, à Bruxelles, le secrétaire à la Défense américain, Pete Hegseth a énoncé les lignes rouges de l’administration Trump, toutes en défaveur de Kyiv. Poutine obtiendrait tout ce qu’il voulait. Territorialement, les Russes devraient garder les 20% du territoire ukrainien qu’ils ont occupé et auront une continuité territoriale vers la Crimée annexée en 2014. Militairement, l’Ukraine ne rejoindra jamais l’OTAN et n’aura pas d'accès à l'arme nucléaire. Politiquement, des élections devront être organisées, préparant la sortie de Zelensky. En précisant que les troupes européennes seront en charge du maintien de la paix en Ukraine, Hegseth ajoute que cette mission ne sera « pas une mission OTAN » et n’entraînera donc pas sa protection - y compris par les Etats-Unis au titre de article 5 du traité sur la solidarité militaire des membres de l’Organisation.
Enfin, vendredi à la conférence de Munich sur la sécurité, le vice-président américain, James David Vance, a lancé une virulente diatribe contre les démocraties européennes, accusées d’étouffer la liberté d’expression et la liberté religieuse.

Kontildondit ?

Michaela Wiegel :
Nous assistons à la fin de cette Pax Americana qui a structuré les relations internationales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Philippe vient de mentionner toutes ces organisations issues de l’ordre d’après-guerre que les États-Unis ont soit quittées, soit ignorées. Prenons l’Organisation mondiale du commerce : il n’y a certes pas eu de sortie officielle, mais une violation flagrante de ses règles. Ce n’est sans doute pas un hasard si cette rupture se manifeste aussi nettement en Allemagne. Le discours du vice-président américain JD Vance à la Conférence de Munich sur la Sécurité en est une illustration frappante. Et le choix de Munich n’a probablement rien d’anodin.
Ce qui est particulièrement inhabituel, c’est qu’à une semaine d’élections importantes en Allemagne – prévues pour le 23 février –, le vice-président américain se permette de donner des leçons de démocratie. Mais il ne s’agit pas réellement de démocratie, plutôt d’une rhétorique appelant à lutter contre « l’ennemi de l’intérieur ». Un langage historiquement très chargé, utilisé dans un contexte lui-même marqué par un attentat à Munich quelques jours avant la conférence. Vance s’est appuyé sur cet événement pour justifier cette lutte contre l’ennemi intérieur et, de manière à peine voilée, appeler à voter pour l’Alternative für Deutschland (AfD), le parti d’extrême droite. Ce qui est troublant, c’est que ce message venu des États-Unis semble légitimer, voire encourager, les idées portées par l’extrême-droite européenne. Parallèlement, Vance s’est rendu au mémorial du camp de concentration de Dachau pour honorer la mémoire des victimes du nazisme, alors même que l’AfD demande à « tourner la page » et dénonce un « culte de la culpabilité ». Nous sommes donc à un tournant : au lieu d’un message attendu sur l’Ukraine, il n’y a eu aucun engagement sur cette guerre qui se déroule pourtant sur le sol européen. À la place, nous avons entendu un discours contestant l’ordre établi et reprenant des thèmes chers à l’AfD, notamment la « rémigration ». Cette situation est d’autant plus paradoxale que le vice-président américain lui-même, marié à une femme d’origine étrangère, serait dans la ligne de mire de ce même parti. Cette contradiction illustre bien le décalage entre ce que l’administration Trump prêche à l’étranger et la réalité de ceux qui la représentent.
J’avoue cependant conserver une lueur d’espoir : tout cela est peut-être moins organisé et cohérent qu’il n’y paraît. Il est possible que ce soit avant tout le signe d’une mauvaise préparation. Le discours de Vance à Munich ressemblait davantage à un discours de campagne américaine qu’à une intervention destinée à renforcer Make America Great Again sur la scène internationale. Or, soutenir les mouvements populistes et d’extrême-droite en Europe signifie aussi se créer de nouveaux adversaires. Car l’AfD, comme d’autres partis nationalistes européens, défend une ligne qui, en fin de compte, pourrait bien aller à l’encontre des intérêts américains.

François Bujon de l’Estang :
Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour le général de Gaulle, qui disait : « les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. » Trump s’est emparé de cette maxime et l’a poussée jusqu’à son paroxysme, de la manière la plus brutale et la plus choquante. Dans sa version, cela se traduit par America First. Les voisins ? On les piétine. Il l’a montré dès le premier jour avec le Mexique et le Canada. Il les méprise, au point de proposer au Canada de devenir le 51ᵉ État de l’Union, ce qui a fait sourire quelques diplomates, dont je suis (car nous considérons depuis longtemps que cette place est déjà occupée par le Royaume-Uni). Pas de voisins, pas d’alliés : ces deux concepts ne l’intéressent pas. Il brusque ses partenaires, comme il l’a déjà fait avec les membres de l’OTAN, en leur enjoignant d’augmenter leurs dépenses militaires pour ne plus être des freeloaders – des passagers clandestins voyageant sur le dos de l’armée américaine sans payer leur part.
Ce qui est radicalement nouveau, c’est qu’il n’y a plus aucune place pour les valeurs dans la politique étrangère américaine. Depuis 1776, depuis Jefferson et la Déclaration d’indépendance, les États-Unis se sont toujours vus comme une puissance messianique, porteuse d’un message universel. Avec peut-être la France, c’était le seul pays au monde à avoir cette ambition, ce qui explique d’ailleurs beaucoup de nos désaccords historiques. Mais désormais, il n’est plus question de défendre des principes : seuls comptent l’argent et le pouvoir. Quand Trump se revendique comme le « grand disrupteur », il ne ment pas : il bouleverse complètement la tradition diplomatique américaine. Ainsi, il veut en finir avec les conflits en cours. Il a affirmé qu’il mettrait fin à la guerre en Ukraine en 48 heures, puis il a révisé son délai à 100 jours, puis à six mois… En attendant, il a déjà entrepris des négociations directes avec Vladimir Poutine. Et pourtant, lui qui se prétend le roi de la négociation – The Art of the Deal est le titre de son livre – s’y prend d’une manière totalement désastreuse. Avant même de s’asseoir à la table des discussions, il a déjà accordé à la Russie des concessions majeures : l’Ukraine ne rejoindra jamais l’OTAN, et les territoires occupés par la Russie depuis 2014 ne seront pas restitués. Ce sont les ultimes concessions, celles qu’un négociateur devrait garder pour la fin, or il les accorde dès le départ. Quant à Gaza, il veut y bâtir Trumpland, une « riviera du Moyen-Orient », selon ses propres termes. L’idée est de raser les gravats et construire une zone balnéaire luxueuse, sous souveraineté américaine. Les États-Unis prendraient le contrôle de Gaza « pour longtemps », selon ses mots. Mais ce projet s’accompagne de ce qui, jusqu’à preuve du contraire, s’appelle une épuration ethnique : les Palestiniens seraient déportés vers d’autres pays arabes… qui n’en veulent pas.
Les méthodes sont donc proprement stupéfiantes, et nous n’en sommes qu’au début. Il faut se garder des jugements définitifs, mais une chose est sûre : nous entrons dans une période de turbulences violentes et durables. Alors, attachons nos ceintures …

Lucile Schmid :
En 2017, face au premier mandat de Trump, la résistance s’était organisée au sein même des États fédérés américains. Aujourd’hui, la situation est radicalement différente. Il y a une guerre sur le sol européen, les contre-pouvoirs aux États-Unis sont affaiblis, et c’est donc à l’Europe qu’il revient de prendre la responsabilité de résister.
François a évoqué un problème de valeurs, mais je crois qu’il s’agit d’un problème encore plus fondamental : celui des règles du jeu. Nous avons face à nous un tricheur, quelqu’un qui détruit les cadres établis. Ce n’est pas seulement une question de principes, c’est une remise en cause systématique des règles. Or, l’Europe a toujours fonctionné en se fixant des règles communes, en structurant sa coopération entre des États aux intérêts parfois divergents, mais qui cherchent à en construire de communs. Cette approche est aujourd’hui violemment heurtée par la méthode Trump. Les Européens, comme les Américains eux-mêmes, sont sidérés par ce mode d’action.
Mais à Munich, plusieurs signaux encourageants ont émergé. Le discours du ministre de la Défense allemand a été particulièrement fort, plus que ce à quoi on pouvait s’attendre. Il y a là un principe de réalité : la guerre se déroule sur le sol européen, et les Européens doivent se ressaisir. Il faut développer des stratégies communes, non seulement en réaction aux décisions américaines, mais aussi en matière de défense. Dans cette perspective, les propos du président Zelensky sont essentiels. Il est sans doute celui qui est le plus confronté au principe de réalité. Il s’est adressé à Trump en des termes très directs : « J’ai des terres rares, nous pourrons en discuter. » Et immédiatement, Trump a répondu : « On va faire quelque chose ensemble », sans même vérifier si ces ressources existent réellement en quantité significative en Ukraine (ce qui en dit long sur son approche).
Mais M. Zelensky s’est aussi adressé aux Européens avec un message clair : « Nous faisons la guerre, nous savons ce que c’est. Vous devez développer une stratégie commune de défense, et l’Ukraine peut vous y aider. » C’est un appel fort, et il marque une prise de risque politique de sa part. Or, ce qui frappe, c’est que peu de dirigeants européens ont osé adopter une posture frontale face à JD Vance. À Munich, hormis peut-être le ministre allemand de la Défense, aucun ne s’est levé pour lui dire : « Nous n’avons pas de leçons de démocratie à recevoir d’un homme qui, aux États-Unis, prétend que les juges n’ont pas à contraindre le pouvoir exécutif. » Cette absence de confrontation directe pose la question du rapport de force et des dynamiques psychologiques en politique.De Gaulle avait une qualité essentielle : le courage. Or, aujourd’hui, c’est bien cela qui est en jeu. C’est un défi à la fois simple et terriblement difficile dans un monde habitué à la modération, parfois même à l’hypocrisie, où les conflits sont souvent évités plutôt que réglés. Pourtant, la situation exige d’affronter les réalités de manière frontale.
La dimension économique est un autre enjeu fondamental. Il y a quelques années, j’ai beaucoup travaillé sur la guerre commerciale entre Boeing et Airbus et sur les conflits au sein de l’OMC (à l’époque le GATT). Or, la politique économique de Trump me semble totalement déconnectée des réalités. L’Amérique n’est pas seule au monde. Elon Musk lui-même, qui aujourd’hui joue un rôle central dans l’administration Trump, fabrique et investit partout dans le monde. D’ailleurs, rappelons qu’en 2016, M. Musk avait refusé de soutenir Trump lorsque celui-ci avait retiré les États-Unis de l’accord sur le climat. Il savait déjà que les réalités économiques finissent toujours par rattraper les décisions politiques. Aujourd’hui, ceux qui soutiennent Trump pour des raisons économiques et financières croient défendre leurs intérêts immédiats. Mais que se passera-t-il lorsque les conséquences de ces politiques se feront sentir ? L’économie est mondialisée, et les effets des décisions protectionnistes ne se manifestent pas en quelques jours. Les taxes douanières ne déclenchent pas immédiatement un afflux d’investissements étrangers. En menaçant les Européens, les États-Unis prennent un pari risqué. Reste à voir s’ils en assumeront les conséquences.

Jean-Louis Bourlanges :
La première question est de savoir si les Américains sont simplement devenus hésitants dans leurs alliances ou s’ils ont radicalement changé de pied. Et je pense que Trump procède à un véritable renversement d’alliance. J’ai évoqué tout à l’heure l’alignement idéologique profond entre l’administration Trump, la Russie et la Chine. Mais ce basculement est aussi perceptible dans la rhétorique employée vis-à-vis des alliés traditionnels : mépris, injures et insultes pour les Canadiens, l’UE, les Allemands, les Norvégiens, les Danois… et en parallèle, des gestes de clémence et de complicité envers Moscou. Le livre récemment paru, Notre homme à Washington, montre bien que Trump, dès l’époque de Reagan, prenait des positions favorables à un arrangement avec les Russes, alors que Reagan menait une politique visant à les faire plier. Ce retournement est donc ancien, mais il prend aujourd’hui une ampleur inédite.
La deuxième remarque porte sur l’irréalisme profond des mesures en question. François a cité la célèbre formule du général de Gaulle, mais je dois avouer qu’elle ne m’a jamais totalement convaincu. De Gaulle l’a peut-être dite, mais cela ne reflète pas toute la complexité de sa pensée. Il était profondément enraciné dans une solidarité humaniste et démocratique, que ce soit en 1940 ou lors de la crise de Cuba. Et puis, Trump ne défend pas les intérêts de l’État américain : il défend les intérêts oligarchiques, financiers et particuliers qui s’organisent autour de lui. Le conflit d’intérêts, chez lui, n’est pas une anomalie, mais un mode de fonctionnement. Ce n’est pas un problème, c’est une garantie : les gens qui gèrent les affaires sont compétents, justement parce qu’ils prennent tout pour eux-mêmes. Cela se voit dans la manière dont la question ukrainienne a été détournée vers celle des terres rares. C’est une illustration parfaite de cette boulimie matérialiste. Et que dire de Gaza ? Comme l’a très bien expliqué François, nous sommes face à une entreprise de purification ethnique à la fois en Cisjordanie et à Gaza.
Mais au-delà de l’aspect moralement condamnable, c’est aussi totalement irréaliste. Regardons l’Ukraine : si Trump cherche réellement un accord avec Poutine, pourquoi commencer par lui accorder immédiatement toutes les concessions ? Il n’est pas rare de voir des chefs d’État rêver du prix Nobel de la paix, mais il est plus difficile d’imaginer obtenir ce prix tout en offrant des garanties à Taïwan et en cédant d’emblée sur l’Ukraine. Trump n’en est pas à son coup d’essai en matière de négociations ratées. Regardez les accords de Doha sur l’Afghanistan : il avait tout négocié, tout formalisé, et le résultat a été catastrophique. Quant à la Corée du Nord, sa tentative de rapprochement avec Kim Jong-un a été tout aussi désastreuse.
La question qui se pose est donc celle de notre réaction. La première chose à faire est d’arrêter de quémander une place à la table des négociations. Nous devons dire clairement : « nous ne sommes pas concernés par une discussion entre Trump et Poutine qui exclurait l’Europe, et nous devons agir en conséquence. » Si nous voulons fournir une coopération nucléaire à l’Ukraine, c’est notre décision souveraine. Si nous voulons renforcer la position ukrainienne face à la Russie, nous devons le faire sans attendre un feu vert américain. L’administration Trump ne veut pas de nous ? Très bien. Mais nous devons cesser de penser que nous avons besoin de son approbation pour exister.
Cela dit, notre position n’est pas simple. Nous ne sommes ni prêts à rompre avec les États-Unis, même s’ils nous humilient et nous marginalisent, ni capables de les remplacer en tant que puissance dominante. Il faut alors s’interroger sur les raisons de nos faiblesses. J’en vois trois grandes. D abord, la fragmentation politique : les Européens sont profondément divisés, ce qui les empêche de réagir de manière unifiée et efficace. Ensuite, la démobilisation : nous sommes attachés, à juste titre, à notre modèle social, qui repose sur une forte solidarité et une réduction des inégalités. Mais cet attachement nous empêche de faire des choix stratégiques ambitieux, alors même que des efforts supplémentaires pourraient être réalisés sans remettre en cause ce modèle. Enfin, les contradictions internes du camp démocratique : nous payons aujourd’hui la division des défenseurs de la démocratie entre deux visions opposées. D’un côté, une logique wokiste, qui domine une partie de la gauche européenne et américaine, et qui a tendance à fragmenter les sociétés en opposant les communautés les unes aux autres. De l’autre, une tradition universaliste, qui défend les droits des individus en tant qu’êtres humains, quelle que soit leur origine. Cette fracture affaiblit considérablement les forces démocratiques, et elle est en partie responsable des difficultés du Parti Démocrate aux États-Unis comme de celles d’un projet politique fort pour la démocratie en Europe. Nous devons réagir. Nous savons techniquement comment le faire. Mais politiquement, nous sommes pris dans des contradictions profondes, et redoutables. C’est pourquoi, je l’avoue, je ne dors plus la nuit.

Les brèves

À l’approche de la cérémonie des César

Philippe Meyer

"Puisque nous sommes menacés dans une quinzaine de jours de la 50ème cérémonie des César, j’aimerais encourager nos auditeurs à revoir le discours qu’avait fait l’humoriste Ricky Gervais, invité à présenter les Golden Globes de 2020. Certains passages, adressés aux acteurs nommés, me paraissent valoir d’être cités : « Si vous gagnez un prix ce soir, n’en faites pas une plateforme pour un discours politique. Vous n’êtes pas en position de faire la leçon au public sur quoi que ce soit. Vous ne connaissez absolument rien du monde réel. La plupart d’entre vous avez passé moins de temps à l’école que Greta Thunberg. Alors si vous gagnez, montez sur scène, acceptez votre petit prix, remerciez votre agent, et votre Dieu, et dégagez. » (…) « Nous devions faire une séquence « In memoriam » cette année, mais quand j’ai vu la liste des gens décédés, je me suis rendu compte qu’ils n’étaient pas assez issus de la diversité. C’était surtout des gens blancs, et je me suis dit « ah non. Je ne laisserai pas passer ça »."

Les Feux sauvages

Lucile Schmid

"Je vous recommande ce film chinois, dont l’action se déroule sur une vingtaine d’années, et qui à travers la relation entre une femme et un homme, nous fait voir à quel point le pays a changé en deux décennies. Les deux personnages sont déphasés dans leur propre pays, qu’ils parcourent de long en large, tant l’accélération des changements est grande. Ce sentiment d’étrangeté dans son propre pays est particulièrement bien rendu dans le film, et il n’est pas propre qu’à la Chine. Il y a bien sûr les paysages chinois, mais aussi TikTok … Et plus largement, un propos d’un portée universelle. "

Le déclin français est-il réversible ? Renverser la table et sortir de la servitude

Jean-Louis Bourlanges

"Et puis celui de Jacques de Larosière, formidable nonagénaire, doté d’une alacrité et d’une fraîcheur d’esprit tout à fait réjouissantes. Personnellement je me dis que le déclin français est réversible, à la condition d’être européen. Et malheureusement, il semble que de Larosière ne soit pas de cet avis. Il m’a gentiment dédicacé son livre, et il m’y dit : « Bourlanges a beaucoup fait pour l’Europe, et aujourd’hui, on peut s’interroger ». "

Je dirai malgré tout que la politique est belle

Michaela Wiegel

"Ce livre est signé de Clément Beaune, qui a beaucoup œuvré pour l’Europe et a été sorti du gouvernement parce qu’il avait critiqué la loi immigration. En dehors de propos très personnels, ce qui m’a fasciné dans ce livre, et de la part d’un auteur si proche du président Macron, c’est l’idée que le système présidentiel de la Vème République devait absolument être réformé, parce que le présidentialisme n’était plus adapté à la démocratie française. "

Pologne, histoire d'une ambition : comprendre le moment polonais

François Bujon de L’Estang

"Les éditions Tallandier publient ce livre de Pierre Buhler, qui a été l’ambassadeur de France en Pologne à deux reprises, parle couramment polonais et connaît fort bien le pays, auquel il a déjà consacré un ouvrage. Dans celui-ci, il fait un survol de mille ans d’histoire polonaise pour montrer que ce pays a développé, à travers son catholicisme, son courage et sa détermination, une sorte de capacité de résistance, qui le place aujourd’hui comme une clef de voûte possible pour une nouvelle sécurité européenne. Si les développements de l’affaire Trump-Poutine nous y amènent, nul doute que la Pologne sera au centre de ce nouveau système. Elle fait aujourd’hui ce qu’il faut faire : elle dépense 5% de son PIB pour s’armer. Le livre de Pierre Buhler éclaire ce à quoi on peut s’attendre de la part de ce pays résilient."