La République la force d’une idée

Brève proposée par Jean-Louis Bourlanges dans l'émission Les régionales dans la perspective des présidentielles / n°200 / 4 juillet 2021, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

La République la force d’une idée

Jean-Louis Bourlanges

"J’attire votre attention sur ce livre récemment publié. Il est signé de Jean Picq, magistrat de la cour des comptes et professeur à Sciences Po, où son cours portait sur l’Etat. C’est une réflexion sur la République que je vous soumets aujourd’hui, car il me semble très important de savoir ce que nous avons en commun : la République, et non pas ce que Sieyès appelait par opposition la « Re totale ». C’est la réflexion d’un homme modéré, politiquement au centre, d’un catholique attaché à la laïcité, et qui nous donne de la République une idée ouverte de trois manières. D’une part elle n’est pas simplement nationale, et le livre montre tout ce qu’elle doit à la tradition américaine, à la tradition néerlandaise et à la tradition anglaise. D’autre part, il déconnecte la République de la Révolution française. C’est une idée qui m’est chère, que j’avais trouvée chez François Furet : la vraie République s’est construite sur la négation de la fureur révolutionnaire, dans les années 1870-1880. La troisième ouverture est sur l’Europe. Picq est de ceux qui ne posent pas comme antinomiques l’organisation de la cité nationale et de l’organisation de la cité européenne."


Les autres brèves de l'émission :

Ennemis héréditaires ?

Marc-Olivier Padis

"J’ai lu avec beaucoup d’intérêt un dialogue franco-allemand entre deux historiens : Hélène Miard-Delacroix et Andreas Wirsching. Ils dialoguent sur les relations franco-allemandes, essayant de lever des malentendus et de mieux faire comprendre nos histoires respectives. C’est très plaisant à lire, très vif, et on se rend compte à quel point la constitution même de la nation allemande dépend de l’Histoire française, et des agressions successives de la France. Leur conversation va jusqu’à la période contemporaine, et nous laisse voir tout le chantier qu’il y a encore à mener dans le dialogue franco-allemand."


Napoléon l’exposition

David Djaïz

"Je profite de cette redondance pour faire une deuxième recommandation : allez visiter la très belle exposition Napoléon à la grande halle de la Villette. Je n’ai pas une sympathie démesurée pour le personnage, je partage le jugement du général de Gaulle, qui faisait remarquer qu’il avait rendue la France plus petite qu’il ne l’avait prise, mais c’est très bien mis en scène, il y a beaucoup de pièces très intéressantes, on peut par exemple y voir la magnifique scène inaugurale du Colonel Chabert, avec la légendaire charge de cavalerie, l’une des plus meurtrières de la Grande armée. "


Le peuple du Larzac

David Djaïz

"Ce n’est pas par fayotage, mais il se trouve que je voulais vous recommander cette semaine le même livre que Philippe. Quand j’ai vu le sous titre : « une histoire de crânes, sorcières, croisés, paysans, prisonniers, soldats, ouvrières, militants, touristes et brebis », cela m’a beaucoup attiré. Effectivement, j’avais du Larzac cette image d’un plateau où une horde de normaliens barbus étaient venus protester dans les années 1970 contre l’extension du camp militaire. Artières nous montre que ce territoire est un bouillons culture depuis bien plus longtemps que cela."


La société écologique et ses ennemis / L’âge productiviste / La cité écologique

Lucile Schmid

"Je vous recommande de lire ou relire la trilogie du philosophe et historien Serge Audier. Il écrit depuis déjà longtemps sur la façon dont l’écologie traverse l’histoire des idées à gauche. Cette trilogie a commencé en 2017, et l’année dernière, Serge Audier a osé un livre plus programmatique. C’est l’une des premières fois que je m’aventure moi aussi sur le terrain de la République, et je trouve intéressant que l’auteur aborde les limites de l’écologie politique, telle qu’elle est notamment incarnée par les Verts, avec l’idée que, comme elle a toujours été incarnée par une minorité, elle n’a jamais vraiment abordé la question de l’exercice du pouvoir. Comment les écologistes pourraient-ils s’emparer des institutions et cesser de ne se voir que comme un contre-pouvoir ?"




Ce qui est arrivé à Wounded Knee

Richard Werly

"Je vais vous parler des Etats-Unis de décembre 1890, et du formidable récit que nous fait Laurent Olivier de « Ce qui est arrivé à Wounded Knee ». Ce massacre des Indiens un eu lieu la veille du nouvel an 1891, où l’armée américaine a massacré toute la tribu du chef Big Foot, l’un des derniers résistants à l’occupation de l’Ouest américain. Plusieurs livres d’anthologie ont déjà paru sur cette affaire, mais en anglais. Celui-ci est l’un des premiers en français, il est absolument passionnant, et nous montre une fois de plus que les fractures américaines sont toujours là, dans ce pays dont on sait l’importance qu’il a pour nous tous."


Cosmogonies. Zinsou, une collection africaine / Marylin Minter : all wet / Betty Tompkins : raw material

Lionel Zinsou

"Je vous recommande une visite à Montpellier, au musée d’art contemporain, le Mo.Co. J’y ai vu deux expositions. La première est purement narcissique, il se trouve qu’elle est consacrée à l’art contemporain africain. Comme elle s’appelle « Zinsou » je ne la commenterai pas, et ne vous dirai pas à quel point elle est bien faite et éclairante. Je mettrai donc l’accent sur un autre bâtiment, la panacée, qui appartient au même musée. On peut y voir une exposition féministe de deux américaines travaillant avec de passionnantes techniques d’acrylique sur le corps féminin. Leur travail part de dessins et de photos pornographiques, l’exposition est donc interdite aux mineurs non accompagnés, elle vient d’ouvrir et n’a pas encore eu le temps de faire scandale."