Israël : le piège de l’Histoire

Brève proposée par Nicole Gnesotto dans l'émission Revoir les dépenses publiques / Israël-Iran, la prochaine guerre ? / n°345 / 14 avril 2024, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

Israël : le piège de l’Histoire

Nicole Gnesotto

"Pour prolonger notre conversation, je vous recommande vivement ce livre. Il est formidable, c’est à mon avis de loin le meilleur ouvrage d’Araud. Parce que c’est certes d’un livre d’Histoire, mais il n’a rien d’universitaire. Gérard Araud a fait deux séjours diplomatiques en Israël, le premier à 30 ans comme conseiller à l’ambassade, le second 20 ans plus tard en tant qu’Ambassadeur de France. Il insiste sur trois évolutions qu’il a constatées : d’abord le passage de gouvernements de gauche à des gouvernements de droite, voire d’extrême-droite ; ensuite le passage d’une d’une culture ashkénaze à une culture séfarade, et enfin le passage d’une communion dans le souvenir de la Shoah à une religion fondée sur la lettre de la Torah, divine et donc non négociable. Ces trois passages expliquent à ses yeux la radicalisation de la politique de l‘État hébreu, dont la colonisation de la Cisjordanie, qu’il analyse de façon très sévère. Sa conclusion (pas très optimiste) est la suivante : si l’on veut dépasser le conflit israélo-palestinien, il faut oublier l’Histoire, car elle donne raison aux deux peuples."


Les autres brèves de l'émission :

Fauré : complete music for solo piano

François Bujon de L’Estang

"Il n’y a plus grand chose qui fonctionne en France, si ce n’est l’enseignement musical, et notamment celui du piano. Lucas Debargue est un pianiste de 34 ans, dont la qualité de jeu ne cesse de nous éblouir. Il a été médaillé au concours Tchaïkovsky en 2015, et vient de publier chez Sony une intégrale de la musique pour piano de Gabriel Fauré que je trouve remarquable. Souvent, la musique de Gabriel Fauré est interprétée avec des brumes « debussystes ». Lucas Debargue évite cet écueil, il joue avec une clarté et une sérénité magnifiques ces œuvres pour piano particulièrement délicates, qui ont influencé toute la musique française du XXème siècle"


Diên Biên Phu : les leçons d’une défaite

Richard Werly

"Ce livre d’Histoire de Pierre Servent vient de paraître. Il est original en ce qu’il parle assez peu de la bataille elle-même (bien connue), mais davantage ce qui se passe dans l’état-major à Paris. Il nous fait comprendre ce qui a amené ce choix sidérant du site du Diên Biên Phu pour livrer bataille, ainsi que la cécité totale face aux capacités des Vietnamiens. C’est très éclairant : on s’aperçoit en le lisant que si une bataille n’est pas menée avec l’appui entier et lucide des politiques, elle ne peut pas être gagnée. "


Amateur d’art (Alias Caracalla 1946-1977)

Marc-Olivier Padis

"De l’Histoire pour moi aussi, avec le deuxième tome des mémoires de Daniel Cordier, alias Caracalla. Daniel Cordier était le secrétaire de Jean Moulin pendant la guerre, et ce qui est vraiment passionnant, c’est que dès la fin de la guerre, Cordier refuse de rester dans un culte de la Résistance, ou d’apparaître comme un ancien combattant. Il décide donc de changer complètement de vie. Entré très jeune dans la Résistance, il n’a pas vraiment de formation, alors il hésite beaucoup, puis réalise qu’il a un excellent coup d’œil pour la peinture, et il devient galeriste. Il se passionne notamment pour l’Ecole de Paris. Le livre est très touchant, non seulement parce que la personnalité de Daniel Cordier est très attachante, mais aussi parce qu’il y a une continuité un peu mystérieuse avec Jean Moulin, puisque c’est lui qui avait initié Cordier à la peinture moderne. Daniel Cordier deviendra un galeriste important, ouvrant des succursales à Francfort et à New York, et participant à la création du Centre Pompidou. Il continue à suivre la vie politique et en 1958, sa réaction au retour du général de Gaulle est intéressante. En tant que résistant, il est un défenseur inconditionnel de de Gaulle, et pourtant il n’approuve pas les circonstances de son retour. "


Courriel d’un auditeur après mon appel de dimanche dernier

Philippe Meyer

"Votre appel à contribution diffusé dimanche dernier m'inspire deux choses. D'abord, une vilaine paresse morale, peut-être favorisée par la société de l'instantané et de l'oubli (parfois de l'oubli instantané) au sein de laquelle nous vivons, m'a conduit à ne pas exprimer jusqu'ici ma profonde gratitude pour l'œuvre de salut public que vous avez engagée et soutenue depuis tant d'années. Je souhaite réparer cette faute. Grâces vous soient rendues, du fond du cœur, pour cette entreprise. L'existence d'un débat véritable étant à mes yeux l'une des conditions les plus élémentaires de la vie démocratique, vous entretenez une flamme dont les torrents d'invectives et de fake news contribuent chaque jour à montrer combien elle est fragile, et combien elle est nécessaire. J'ai pris ce matin un abonnement mensuel pour soutenir l'effort de guerre."