Black Indians de la Nouvelle-Orléans

Brève proposée par Lucile Schmid dans l'émission Ukraine : un « changement de nature » de la guerre ? / La gauche de gouvernement trouverait-t-elle un modèle en Amérique latine, si Bolsonaro perdait ? / n°267 / 16 octobre 2022, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

Black Indians de la Nouvelle-Orléans

Lucile Schmid

"Je vous recommande cette exposition parisienne, au Musée du Quai Branly - Jacques Chirac. Elle est très enthousiasmante, elle met en valeur le carnaval de la Nouvelle-Orléans. Les « Black Indians » ne sont pas des Amérindiens, ce sont à l’origine des esclaves noirs, mais qui ont repris à leur compte les oppressions subies par le peuple amérindien au moment de la colonisation de l’Amérique du Nord. L’exposition est à la fois luxuriante, car on peut y voir le costume du « Bison Blanc », mais on y apprend beaucoup. On réalise la proximité avec des rites yorubas issus d’Afrique de l’Ouest, on y voit aussi l’union de tous ceux qui ont été asservis, et qui grâce à la créativité et au syncrétisme échappent cette condition. Vous en sortirez avec une envie d’être carnavalesque, tout à fait bienvenue dans le monde d’aujourd’hui. "


Les autres brèves de l'émission :

Une étrange obstination

Lionel Zinsou

"Je vous conseille le livre de Pierre Nora. Il est biographique, et l’académicien y fait montre d’une jeunesse à peine imaginable pour ses 91 ans. Il retrace sa vie d’éditeur et d’historien. Il fut chez Gallimard le créateur de toutes les collections d’Histoire. Avec la revue « le Débat » et avec toutes ses publications, qu’elles soient grand public ou académiques, il est un peu l’équivalent de ce que fut Gide pour la Nouvelle Revue Française il y a cent ans. On voit passer quelques grands penseurs dans ce livre : Jacques Derrida, Michel Foucault, Marcel Gauchet, et tous les grands historiens des Annales (Le Goff, Braudel …). C’est une biographie collective de ce qui fut probablement la plus grande épopée de sciences sociales en langue française. "


Madame l’Ambassadeur : de Pékin à Moscou, une vie de diplomate

Philippe Meyer

"Je vous recommande ce livre de Sylvie Bermann, première femme à avoir été élevée à la distinction d’Ambassadeur de France. C’est beaucoup plus que « de Pékin à Moscou », ce pourrait être « de Pékin à Pékin », puisqu’elle a commencé sa carrière dans le Pékin maoïste pour la finir dans celui de Xi Jinping. Elle raconte également différentes négociations auxquelles elle a participé, notamment celle pour le traité de paix au Cambodge, qui fut très compliquée. L’avenir dira s’il faut ou non un corps diplomatique, mais ce livre prouve une fois de plus que la diplomatie est un métier, qui demande beaucoup de finesse et de vision."


Discours de Josep Borrell

Richard Werly

"Je vais vous parler du discours que Josep Borrell a prononcé ce lundi 10 octobre devant la conférence des ambassadeurs européens. Il fut extrêmement intéressant. Borrell est un homme politique, il est socialiste, Espagnol, il a été président du Parlement européen. Il a commencé par faire quelque chose qui ne se fait pas : dire aux ambassadeurs qu’ils doivent travailler. La puissance et l’influence de l’UE dans le monde ne pourront être défendues que grâce à un gros travail de terrain. Il faut d’abord apporter les bonnes informations, et cela ne en se limite pas à lire la presse. Ensuite, il faut être des relais d’influence de l’Europe dans les pays où ils sont nommés. J’ai trouvé que tout cela était vrai, courageux, et que cela démontrait que les diplomates ont besoin d’être secoués de temps à autre. "


L’internat

Philippe Meyer

"Jacques Pilet : Ce livre de me tient beaucoup à cœur. Son auteur Serhiy Jadan est un grand écrivain ukrainien (dont plusieurs livres sont traduits). Celui-ci décrit la situation dans le Donbass en 2014. L’auteur est originaire de cette région (de Lougansk) et il décrit l’histoire d’un prof qui va chercher son neveu dans un internat situé dans une zone de combat. La description des débuts de ce conflit est absolument saisissante, on voit que c’est une guerre civile : les Ukrainiens entre eux s’opposent, se méfient, se dénoncent ou se tolèrent. On écoute l’accent de son interlocuteur pour lui témoigner sympathie ou hostilité … Il n’y a pas réellement de ligne de front, seulement quelques explosions ici ou là. Mais surtout des villes étouffées par la peur, avec des chiens qui rôdent, des bus qui s’arrêtent en pleine campagne, des trains qui ne partent pas, une sorte de pourriture de la vie quotidienne, avec au ventre la peur de l’Autre. J’ai rarement lu un récit qui parle de la guerre ainsi. "