Fado dans les veines

Brève proposée par Akram Belkaïd dans l'émission La droite en désordre de marche / Y aura-t-il une guerre pour l’Ukraine ? / n°223 / 12 décembre 2021, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

Fado dans les veines

Akram Belkaïd

"Je vous recommande un spectacle de Nadège Prugnard, qui est à la fois une pièce de théâtre et un spectacle musical, qui se joue au théâtre de l’Echangeur à Bagnolet. Il s’agit de l’itinéraire d’une fille d’immigrés portugais, sa destinée et celle de ses parents. Le spectacle rappelle des choses dont on ne parle plus en France, par exemple que l’immigration portugaise a longtemps été clandestine, avec son lot de misères, de passeurs … C’était à l’époque où le Portugal était sous la dictature de Salazar, et de nombreux immigrés portugais atterrissaient dans des bidonvilles français et y sont restés longtemps. L’auteure-metteuse en scène raconte sa volonté de sortir des « trois f » (Fado, Fátima et Football). Le récit est puissant, la musique est bonne et il y a deux chanteuses de fado sur scène."


Les autres brèves de l'émission :

Trésors de la collection Al Thani

Nicole Gnesotto

"Je voudrais partager avec vous une expérience artistique assez rare : la visite de la collection Al Thani à l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde. Le cadre est déjà exceptionnel, mais l’exposition est exceptionnelle puisque c’est la première fois (du moins pour moi) qu’une collection est consacrée à notre commune humanité. Les objets rares qu’a réunis ce milliardaire qatari ne sont pas regroupés par période ou par civilisation, mais par thème. Il y a notamment une galerie de sculptures de têtes, dans toutes sortes de matériaux, où l’on voit une tête de Mésopotamie vieille de 5500 ans, à côté d’une autre tibétaine, mexicaine, égyptienne … C’est vertigineux car ce téléscopage ne montre qu’une chose : à quel point le désir de beauté et de durer sont communs à tous les Hommes. "


L’animal et la mort

Béatrice Giblin

"Je vous recommande cette semaine un ouvrage qui m’a beaucoup plu, celui de l’anthropologue Charles Stépanoff, qui travaillait essentiellement sur les peuples autochtones du sud de la Sibérie. Avec la pandémie, il a dû faire du terrain ailleurs, à une centaine de kilomètres de Paris, en s’intéressant aux chasseurs paysans. C’est extrêmement intéressant, car son enquête montre qu’ils ne sont pas si éloignés que ses sujets dénudés précédents, qui eux aussi chassent, pour se nourrir. Certes les chasseurs paysans ne sont pas dans une culture chamanique, mais la connaissance du milieu, du gibier, et du rapport à l’animal son très comparables. Il parvient à établir deux grandes catégories : l’animal-enfant, avec lequel on joue, l’animal domestique qui ne sait plus rien faire par lui-même, et la production animalière (l’élevage pour la viande notamment). Tout ce qui est hostile à la chasse combine ces deux aspects, mais un autre rapport au vivant est possible : celui de ces chasseurs paysans. Passionnant."


Liquidation de la SAM

Philippe Meyer

"Pendant que trop de médias vaticinent sur des sondages qui leur tiennent lieu de connaissance de la réalité et qu’ils traitent comme des prédictions, dans l’Aveyron, à Decazeville, après la fermeture de la mine de charbon, après la mise à l’arrêt des activités de Vallourec, la Société aveyronnaise de métallurgie, la SAM va être liquidée parce que Renault, son unique client, a décidé de se fournir dans des pays où les rémunérations sont plus faibles et le droit du travail plus accommodant et bien que la SAM consacre près de la moitié de son activité à l’équipement des voitures hybrides et électriques. 333 ouvriers et cadres de la SAM se retrouvent sur le carreau. Ce qui reste du bassin industriel de l’ouest du département, Decazeville, Viviez et Aubin, est frappé à mort par la décision d’une entreprise, Renault, dont l’État est actionnaire à 15%. Nul doute que la décision de Renault n’ait une logique économique, mais une logique économique qui ne prend pas en compte les conséquences sociales de ses décisions n’est pas une logique économique, c’est une logique comptable. Je connais bien cette région ; j’ai vu Decazeville et son bassin prendre les uns après les autres les coups donnés par ces décisions à courte vue, toutes ont blessé, la dernière tue."